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Victoire s'entête

Musée du Louvre
: 2350310930

L'avis de Ricochet

Victoire s’entête est un livre pour enfants écrit et illustré par Claire Cantais, coédité par l’Atelier du Poisson Soluble, une édition du Musée du Louvre, 2006.

Fidèle à elle même, Claire Cantais après Petit Lion ou Chimère, nous propose Dans Victoire s’en tête un découpage d’images issues des œuvres d’art du musée du Louvre.
Les personnages du livre correspondent à des figures peintes, extraites de tableaux ou de sculptures du musée. Elles se détachent de leur tableau pour retrouver toute leur autonomie et jouer leur rôle dans une intrigue simple : une jeune princesse, nommée Victoire, a perdu la tête, elle offre son cœur à celui qui l’aidera à la retrouver. Un défilé de prétendants tente leur chance auprès d’elle en lui proposant des têtes toutes différentes les unes des autres mais en vain. Ce ne sera qu’un jeune homme sans tête, lui aussi, qui parviendra à la séduire.
Par ce découpage de têtes et ce défilé de prétendants, un jeu de correspondances s’établit comme une sorte de puzzle par l’intermédiaire des dernières pages du livre qui offrent la possibilité au lecteur de retrouver à quel tableau appartiennent les têtes. Le ludique et l’esthétique s’associent, pour sensibiliser le jeune lecteur qui apprend tout en s’amusant. Les figures deviennent des énigmes dont il faut retrouver les origines ; ce qui pousse l’enfant à revenir en arrière et parcourir le livre. Cela dit, même si Claire Cantais veut redonner vie aux œuvres d’art, à travers les têtes découpées de tableaux, les illustrations de l’album misent tout sur ces découpages et négligent alors le décor par une pénurie de détails. Ce minimalisme semblerait mettre en valeur les œuvres d’arts « démembrées » qui contrastent avec les décors unis.
C’est avec humour que Claire Cantais plonge son lecteur dans l’univers passionnant d’un musée. On apprécie plus particulièrement l’humour dans les répliques de Victoire, qui s’entête à trouver la bonne tête et qui s’autorise, pour chaque nouvelle venue, un commentaire moqueur ou déplaisant. Elle se plaît aussi à jouer sur les mots. Le titre en témoigne avec l’homonyme « s’entête » et «  sans tête », mais aussi par des expressions telles que « tête en l’air » « avoir perdu la tête » ici à comprendre au sens figuré et propre, « ne pas avoir la tête à ça » ou « faire perdre la tête ». Le langage de Victoire est plutôt relâché, à la portée des enfants, et participe à l’humour du livre.
Malgré l’évocation d’une princesse, d’un château et d’un futur mariage, Victoire s’entête se démarque des contes traditionnels par une désacralisation des codes littéraires. D’emblée, le conte omet la fameuse formule « Il était une fois », pour entrer tout de suite dans le vif du sujet avec un style concis et direct. Claire Cantais nous propose alors un conte plus moderne et plus en phase avec les attentes d’un jeune lecteur actuel, plus réceptif à une princesse qui parle un langage populaire et par l’incongruité des figures mises en scène. L’auteur garde malgré tout une fin heureuse avec un mariage à la clé; mais pas de « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ». Ce livre plaît par son côté déjanté et par son impudence à évoquer et découper les grands chefs d’œuvres de l’histoire de l’art.

Valérie Gallot, étudiante en Licence 3 Parcours Lettres Modernes, UVSQ, Promotion 2007-2008

Seconde critique :
A l’occasion de la sortie de son troisième ouvrage, Claire Cantais signe sa deuxième collaboration avec les éditions de l’atelier du Poisson Soluble. Victoire s’entête s’inscrit dans la continuité graphique qu’offre l’atelier du Poisson Soluble. Cet album est composé de deux parties distinctes. La première partie présente l’histoire de Victoire, une princesse distraite, qui a perdu sa tête. A l’instar de Petit Lion(2005), le lecteur chemine à travers un paysage de lignes courbes et d’arabesques jusqu’au château de Victoire. Cette princesse, personnage éponyme de ce comte moderne, décide d’offrir sa main à celui qui lui proposera une nouvelle tête. Ce sont près de vingt-six œuvres du musée du Louvre qui prêtent leur chef aux prétendants et à cet essayage de têtes. L’ouvrage permet ainsi de redécouvrir de façon originale les œuvres du musée du Louvre. Le lecteur est guidé par Victoire dont le nom fait référence à la victoire de Samothrace. Ce dernier déambule à travers les pièces du palais où il rencontre tour à tour Aménophis IV, François I ou encore saint Louis. La quête de Victoire touche finalement à son but avec la venue à la cour du prince charmant idéal incarné par la sculpture de Pajou, Mercure. Armée de ciseaux et de colle, Claire Cantais assemble corps humains et visages picturaux pour donner une nouvelle vie à ces personnages figés par le temps et par l’histoire. Ainsi, en ouvrant l’album, le lecteur est étonné de voir Albrecht Durer sur une moto ou Séthi I habillé d’un costume trois pièces. En insérant ces figures dans un décor moderne, elle actualise l’histoire et fait ainsi découvrir ou redécouvrir à l’enfant les œuvres d’art qui ont marqué les siècles.
L’univers proposé dans cet ouvrage allie conte moderne et perspectives graphiques. La quête du personnage, fil conducteur de l’histoire s’allie aux illustrations dont la palette de couleurs, offre une continuité au récit. Le vert et le violet de la première double-page précèdent le vert et le rose de la seconde, puis le vert et le blanc de la troisième, et ainsi de suite. De même, la typographie soutient l’utilisation des signifiants. Le fonctionnement verbal des onomatopées s’accorde avec la transcription graphique. Lorsque les personnages chuchotent, la locution « psch, psch » est répétée en s’amenuisant, discrétion oblige. Outre la typographie et les images, l’histoire n’est pas un simple conte de fée car Victoire trouve son prince, mais un prince qui l’accepte telle qu’elle est, et qui lui offre, non pas une nouvelle figure, mais des escarpins, car Victoire aime danser. La première partie de l’album est une invitation au divertissement, à la redécouverte des œuvres d’art pictural ou sculptural, mais il permet aussi d’aborder avec l’enfant la notion d’identité. La deuxième partie permet à l’enfant de découvrir les galeries du musée du Louvre et rend aux personnages de l’histoire leur véritable identité. Outre sa fonction ludique, car l’enfant peut s’amuser à deviner l’identité des personnages, Victoire s’entête aborde la thématique de l’identité chez l’enfant, le fait de devenir une femme mais aussi la question du mariage. Cet ouvrage allie divertissement, art et savoir, et répond aux préoccupations de l’enfant. C’est une véritable réussite.

Charlotte Audran, étudiante en Licence 3 Parcours Lettres Modernes, UVSQ, Promotion 2007-2008

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