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Le trésor animalier en littérature pour l'enfance et la jeunesse

Sur les traces de quelques animaux en littérature jeunesse 3

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Sylviane Rigolet
7 juillet 2022

Écrire un article pour pénétrer dans le monde infini des animaux constitue un défi de taille, tant la diversité des possibilités d’approche est illimitée. Prétendre traiter ce sujet de façon exhaustive ou détaillée l'est tout autant! Ainsi, cet article se propose de fournir quelques pistes de réflexion que les lecteur·rice·s découvriront et pourront alors choisir d’approfondir ou non, selon leur bon vouloir.


Sensibilisation à l’écologie
En observant les publications de ces dix dernières années, force est de constater que le monde éditorial a, en quelque sorte, changé de cap. En effet, les publications en littérature pour l’enfance et la jeunesse semblent suivre les courants actuels qui se préoccupent de l’avenir incertain de notre planète: réchauffement climatique, pollutions en tout genre, extinction massive et rapide d’espèces animales et végétales, diminution drastique des écosystèmes naturels… Aborder ces nouvelles thématiques et sensibiliser les lecteur·rice·s aux nombreux problèmes à résoudre urgemment implique donc, par la même occasion, de changer les protagonistes, d’altérer leurs rôles, d’adapter les lieux où se situent les histoires et de proposer d’autres actions pour structurer leurs trames. Ainsi, le type d’animaux représentés et leur fonction évoluent également.

Ces nouvelles propositions éditoriales concernent aussi bien les tout-petits que les adolescent·e·s. Les messages écologiques véhiculés sont de plus en plus forts et omniprésents. Ils parcourent tous les genres littéraires, et ce avec plus ou moins d’intensité, allant parfois même jusqu’au militantisme. Du livre cartonné au roman, du policier à la BD, du documentaire à la fantaisie, les propos se font souvent percutants, témoins des drames qui sont en train de se produire partout dans le monde. Ils mettent en mots et en images l’urgence de prendre conscience, dès le plus jeune âge, de cette menace. Ces messages incitent également à agir, chacun·e à son niveau, par de petits gestes, proposant des actes concrets, individuels et/ou collectifs, forts de la conviction que «l’union fait la force», comme en témoigne l’album La bonne idée de monsieur Johnson, de Pierre Grosz et Rémi Saillard (La cabane bleue, 2022).

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La bonne idée de monsieur Johnson, de Pierre Grosz et Rémi Saillard (©La cabane bleue)

Animaux dans l’air, sur terre et dans l’eau
Auparavant, les espèces qui occupaient traditionnellement les rôles de protagonistes dans la littérature représentaient des animaux-phares d’un des quatre éléments, d’une région ou d’un lieu spécifique et on retrouvait fréquemment les mêmes animaux, souvent très «typés», car assignés à des caractéristiques et rôles cloisonnés d’avance.

Ainsi, certains oiseaux représentaient (et le font toujours actuellement) l’élément de l’air. Ces volatiles étaient souvent indéfinis, c’est-à-dire que les couleurs, tailles et formes ne donnaient pas d’indices clairs sur leur espèce. Leurs rôles fonctionnaient en quelque sorte comme des références, stables mais aussi stéréotypées, et ce plus particulièrement pour les très jeunes lecteur·rice·s: par exemple, le corbeau de la sorcière, la chouette, digne représentante de la sagesse, ou le coq, en fier maître autoritaire de la basse-cour. Quelques insectes seulement apparaissaient dans les histoires, telles les mouches ou les abeilles, pour y prendre part.

Sur terre, à la ferme, à la maison ou en ville, à la montagne, en forêt ou dans la jungle et la savane, les mêmes animaux occupaient et occupent encore régulièrement les rôles principaux dans les histoires. Souris, chèvres, ânes et cochons; aigles, renards, ours et loups; singes, crocodiles et serpents ou lions; éléphants et girafes, se retrouvent dans d’innombrables aventures, plus ou moins rocambolesques, documentaires, historiques ou humoristiques, pleines d’enseignements éducatifs et de valeurs sûres. Les animaux domestiques et ceux de la ferme ont depuis toujours une place, fondamentale, dans la littérature pour les bébés et les tout jeunes enfants. En effet, ces animaux sont observables alentour et ont donc une réalité concrète, souvent «expérimentable» dans le vécu des enfants d’ici. En effet, il leur est aisé d’entendre le beuglement d’une vache ou les trilles d’un merle, d’observer l’allaitement d’un poulain ou une portée de chatons, de sentir l’odeur du foin des lapins, ou encore de toucher les poils soyeux du chien ou la carapace dure et froide de la tortue. Ces animaux «bien de chez nous» constituent une opportunité d’observation directe avec les cinq sens, une forme de lecture du monde en trois dimensions. L’enfant retrouvera ensuite avec plaisir ces animaux en tant que personnages de son livre d’histoires, cette fois en deux dimensions!

Ce type de «constat» facilite grandement la compréhension de ce passage entre réalité et représentation, la narration visuelle livrant alors plus facilement ses messages. En effet, associée à la lecture à haute voix de l’adulte qui lit à l’enfant, texte et image vont alors tisser des liens subtils pour délivrer un message porteur d’un sens à la fois global et précis, en rapport avec le vécu, les expériences quotidiennes de l’enfant, donc un sens constitutif d’un lecteur actif car investi, comprenant ce que le livre lui transmet à différents niveaux, linguistique, esthétique, psycho-affectif, socio-éducatif... La mémoire sort également renforcée de ces liens entre réalité «sentie pour de vrai» et la compréhension des narratives visuelles et textuelles, car les liens ainsi tissés sont porteurs de sens et donc très significatifs pour le jeune enfant. Progressivement, l’enfant acquiert une plus grande expérience de vie et son langage progresse jour après jour. Il est alors en mesure de comprendre d’autres réalités, donc moins expérimentables, tout en ayant accès à leur sens. Ainsi, il s’intéressera à d’autres lieux de vie, d’autres espèces animales et à leurs aventures lointaines.

Dans l’eau, douce ou salée, calme ou tempêtueuse, cygnes et canards, poissons et baleines se partagent souvent encore aujourd’hui le devant de la scène. Quant aux animaux vivant à l’aise en «bi-espaces», eux aussi ont suscité de longue date un certain intérêt: grenouilles, crapauds ou tortues retenaient la plus grande attention des conteur·euse·s et des écrivain·e·s. Actuellement aussi, après l’énorme vague des publications en tous genres sur les dinosaures, on trouve de magnifiques documentaires sur les fossiles, ceux de l’air, de la terre et de l’eau… dont les dinosaures clôturent la chaîne (cf. La fabuleuse histoire de la Terre, d’Aina Bestard, Saltimbanque, 2020).

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La fabuleuse histoire de la Terre, d’Aina Bestard (©Saltimbanque)

Animaux, traditions et festivités
Dans la culture traditionnelle et populaire, la présence de certains animaux est liée à des régions spécifiques et ils en deviennent le symbole. Selon les continents d’origine des contes ou histoires, le tigre représentait l’Asie, alors que le lion symbolisait le roi des animaux d’Afrique; le cheval était associé aux Amérindiens alors que l’éléphant, en animal de trait, était préféré en Inde; le bison, le bœuf ou le buffle se répartissaient sur trois continents… Et nous pouvons ici encore y reconnaître cette recherche d’un sens provenant de cette lecture de proximité, élément facilitateur d’accès à la compréhension des narratives pour les jeunes enfants…

Les animaux sont également intégrés à la tradition religieuse et à la célébration de certaines fêtes ou événements particuliers. À Noël, pour les chrétien·ne·s, en plus de l’âne et du bœuf de la crèche, des moutons et des chiens de berger, un élément exotique est amené par les trois chameaux des Rois mages ou, plus festivement, par les rennes du père Noël. Les œufs étant un symbole de vie dans de nombreuses traditions et pays, à Pâques, poules, poussins et lapins, gaiement accompagnés de papillons et oisillons, ravissent encore petits et grands, tout en annonçant le doux printemps.

La liste des animaux liés aux tradition et festivités diverses est longue. Ainsi, à la naissance d’un bébé, les cigognes sont de la partie et les coccinelles, ces bêtes à bon Dieu, porte-bonheur, berceront les nouveau-né·e·s dans les comptines et amuseront les tout-petits avec des chansons de doigts et gestes. Les poissons farceurs divertissent tout un chacun au premier jour d’avril et les hirondelles animent joyeusement le retour du printemps, quand l’ours, lui, sort de sa tanière; quant aux oiseaux migrateurs, ils annoncent toujours l’arrivée de l’automne… Et gare à celles et ceux, superstitieux·euses, qui croiseront un chat noir...!

D’autres animaux, symboliques et mythiques, comme les dragons, prennent vie dans les célébrations du Nouvel An Chinois; les centaures, les serpents à sept têtes, le Cerbère, chien gardien des Enfers, et bien d’autres encore appartiennent à l’imaginaire populaire des légendes, contes et épopées traditionnels des différents continents. Dans cet ordre d’idées, il y a également les animaux associés aux signes du zodiaque, des zodiaques, devrions-nous plutôt dire, très différents par exemple pour les Européens et les Chinois.

Les rôles secondaires
Ces dernières années, on assiste à une diversification des animaux qui sont traités soit comme personnages principaux, soit comme humbles accompagnateurs de ces héros. Ces derniers, auxquels on pourrait attribuer un rôle secondaire, exercent un genre de renforcement d’ambiance, aidant, par leur présence discrète, à mieux contextualiser la situation. Ces animaux, vertébrés ou invertébrés, ne sont pas nommés dans le texte; toutefois, ils clarifient une atmosphère, précisent un élément essentiel en le caractérisant ou favorisent un trait d’humour, l’expression d’un visage, ou même l’origine d’une cause aux conséquences souvent fâcheuses.

Prenons l’exemple des animaux domestiques. Si un chat est représenté tranquillement en train de dormir sur son coussin, il transmet implicitement l’idée que tout est calme et paisible pour les personnages principaux. Par contre, s’il devait avoir la queue dressée et hérissée, toutes griffes dehors et plantées au sol, il donnerait un signal d’alarme pour les héros, un signe qui fait peur et dont il leur faut se méfier de toute urgence… Un chien enroulé aux pieds de son maître transmettra un sentiment de douceur, d’amitié, de complicité et donnera donc une touche psycho-affective pleine de sens pour comprendre le climat de l’histoire.

Du côté des invertébrés, les illustrations sont souvent parsemées de petits insectes. Une mouche sur les naseaux d’un buffle pourra facilement être à l’origine de catastrophes en cascade: piqué, le buffle se met à ruer, prend la poudre d’escampette, renverse la cargaison de légumes de sa charrette qui s’éparpillent sur la roue, ce qui met en rage le fermier… etc.! Cet effet domino est souvent utilisé pour créer un enchaînement de péripéties caractéristiques de l’humour de situation, première forme d’humour comprise par le jeune enfant. Au contraire, la présence colorée et légère de papillons apportera de la délicatesse à l’image d’un enfant admirant une fleur, caressant un tronc d’arbre ou se couchant dans l’herbe avec délice.

Les coléoptères, marchant sur le sol, inscrivent parfois discrètement, page après page, une sorte de fil conducteur. Se déplaçant de gauche à droite, ils incitent les lecteur·rice·s à tourner la page et ceux-ci/celles-ci retrouveront alors cette présence significative, représentation facilement lisible de la séquence spatio-temporelle des narratives textuelles et/ou visuelles. Parfois encore, ce coléoptère-fil rouge se figera, comme «suspendu» par une interruption impromptue, en parfait accord avec l’action, elle-même interrompue, de la narration ou avec la situation globale illustrée. Quelquefois même, le coléoptère retournera sur ses pas, comme pour vérifier le bien-fondé de son avancée… ce doute tellement humain qui nous suggère, intimement, de «régresser pour mieux progresser»! (8, 27, 28, 31)[1]

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Couverture et image intérieure de «Maintenant que tu sais» d'Anne Crausaz (©MeMo)

Les rôles principaux
Les animaux fréquemment utilisés comme personnages principaux sont souvent des compagnons habituels de notre quotidien avec lesquels l’humain va vivre une aventure. Les protagonistes sont également des animaux qui font souvent peur, créant une sorte de catharsis pour permettre d’évacuer nos peurs profondes. Ces animaux se démarquent aussi parfois par une caractéristique avec laquelle les lecteur·rice·s peuvent s’identifier facilement. Ces personnages-héros sont alors doués d’intelligence, de ruse, de mémoire prodigieuse, d’instinct incroyable. Ils font preuve de capacités d’organisation pour une vie en communauté réussie, d’esprit de sacrifice pour sauvegarder le clan et permettre la survie du plus grand nombre, de respect de la hiérarchie, du sens du devoir et de l’éducation des jeunes. Certains protagonistes présentent de prodigieuses capacités physiques: vitesse, résistance, survie en conditions extrêmes, adaptabilité, tailles et proportions, etc. Ces dons sont révélés lors d’aventures intéressantes et faciles à suivre, mais qui fournissent aux enfants (et, soit dit en passant, aux adultes aussi!) de précieuses informations réalistes sur ces animaux. Ainsi transmises, ces informations sont souvent plus agréables à lire que les documentaires débordants de données.

Les nouvelles thématiques et valeurs
Lorsque plusieurs animaux sont réunis dans une même histoire, cette présence multiple et protéiforme valorise implicitement la diversité comme une richesse: les différences comme une complémentarité et la participation de chacun comme importante et nécessaire. Sans devoir le nommer explicitement, illustration et/ou texte s’entrelacent pour transmettre un esprit de tolérance indispensable à la vie en communauté, l’intégration naturelle des spécificités de chacun·e, la responsabilité réciproque, la bienveillance, sans passer par la traditionnelle «morale de la fin». Grâce à cette évocation sous-jacente des valeurs fondamentales de la vie en société, celles-ci prennent ainsi racine dans le cœur des lecteur·rice·s et créent les bases stables et puissantes pour croître en tant qu’individu unique, développant activement son potentiel. Toutes ces valeurs restent d’actualité, mais d’autres apparaissent également et sont en train d’occuper une place de plus en plus importante et significative, et ce par l’intermédiaire de deux mouvements qui évoluent en continu et en parallèle et s’entremêlent de forme complémentaire: l’arrivée de nouvelles thématiques et la représentation de nouveaux protagonistes animaux.

Les nouvelles thématiques abordées dans les histoires d’animaux correspondent de plus en plus souvent aux problèmes planétaires et sociétaux qu’il est impératif de traiter: traiter dans le sens de les aborder avec les mots adéquats pour les différents âges des destinataires, mais aussi traiter dans le sens, encore plus complexe, de les soigner en apportant des remèdes concrets, à la fois individuels et collectifs, pour parvenir à trouver des solutions efficaces et rapides. Ces thématiques récentes organisent des histoires autour de ces sujets brûlants d’actualité, en approfondissant plus ou moins les thèmes et en fournissant des données scientifiques de complexité variable. Les personnages animaux y sont des messagers plus ou moins fantaisistes, qui parlent entre eux ou prennent la parole pour s’adresser plus directement aux lecteur·rice·s et ainsi défendre leur cause, comme le feraient des adultes. Toutes ces adaptations sont habilement réalisées en fonction des destinataires des œuvres.

Le genre littéraire utilisé est lui aussi un messager transmettant le plus clairement possible son témoignage, dans un constant souci d’adapter au mieux forme et contenu pour le public à qui se destine l’œuvre. Le choix du format, du type d’ouverture, du graphisme et du matériel constitutif de l’objet-livre, judicieusement associés au style de l’illustration et au genre de texte, permettront alors aux enfants et aux jeunes un accès facilité à la compréhension des messages.

Les nouveaux protagonistes                                                                                                        
En survolant nombre de publications récentes, on s’aperçoit que des animaux jusqu’alors pratiquement ignorés dans la littérature pour l’enfance et la jeunesse deviennent les nouveaux protagonistes. Ce phénomène récent amène un renouveau bienvenu dans le panorama littéraire et il a le mérite de prendre en considération des animaux de tous les continents. En Océanie, thylacines, wombats, ornithorynques, opossums et kiwis apparaissent à côté des kangourous, dingos et koalas. L’Asie nous présente lézards et chameaux, yacks, chacals et buffles, hors les traditionnels pandas. Au Japon plus particulièrement, les grues – celles d’Hokkaïdo comme celles des origamis, considérées traditionnellement comme porte-bonheur – sont mises à l’honneur. En Afrique, le paresseux et l’hippopotame font des leurs, les lémuriens également, sans oublier le clan des suricates! Boas constrictors, tamanoirs et gorilles sont régulièrement mis en avant, ainsi que des oiseaux exotiques comme les pélicans, les spatules ou les flamants roses. En Amérique du Nord, castors, élans, écureuils, grizzlis, poulpes et baleines s’activent au fil des pages. Plus au sud, lamas, perroquets, cacatoès et manchots empereurs nous font «frissonner» d’émotion. En Europe, mulots, campagnols et gerbilles s’affairent dans les champs, alors que blaireau, blairelle et blaireautins, sangliers et marcassins, mésange, pie et Cie, escargots et vers de terre égayent la forêt.

Les insectes, ces petits invertébrés presque insignifiants jusqu’à aujourd’hui, viennent progressivement prendre une place indéniable dans de nombreux albums, indirectement peut-être pour suggérer la place fondamentale qu’ils occupent dans la chaîne alimentaire comme dans la pollinisation des fleurs. Un éphémère nous suggère de réfléchir à la brièveté de la vie (6); un moustique irrite autant qu’un sarcasme (28); une mouche provoque pour éprouver la patience; une coccinelle mal lunée enseigne le passage irréversible du temps (18); la chenille se métamorphose en papillon, promesse de transformation possible; le bousier (8) est un modèle de persévérance et de dédication; le criquet représente les mélodies et bruissements que nous offre l’orchestre de Dame Nature…

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«Éphémère» de Frédéric Marais (©Les fourmis rouges), «La coccinelle mal lunée» d'Eric Carle (©Mijade) et «Gérard le bousier» de Fred Paronuzzi et Andrée Pringent (©Kaléidoscope)

Pour boucler la boucle, revenons aux oiseaux: ils fournissent d’inoubliables histoires pleines de valeurs qui permettent de grandir harmonieusement. Gipsy (9), la pie adoptée par un enfant du voyage, témoigne de l’amitié fidèle, aussi simple qu’inconditionnelle; Péli, le pélican, en sage connaisseur de la vie, offrira un voyage inoubliable au poisson Argento (2); le corbeau, qui a soigné la couvée d’une poule d’eau en son absence (23), vit une solidarité exemplaire; Grand corbeau, déprimé, apprend à découvrir le beau, le positif, malgré le «noir» de la situation (10); Colibri (20), le responsable, donnera une contribution à sa mesure, déterminé et persévérant; le couple de flamants roses (4) saura faire rire à la lecture de son épopée pour sauver son œuf et les dix cacatoès fugueurs (25) nous entraîneront également dans leur jeu de cache-cache comique; on pourra compter sur les 365 manchots (1) pour faire passer un message sur la fonte de la banquise; les oies (34-35), gardiennes de fermes, signes précurseurs de l’automne, légendes ou patrimoines culturels, vont également apporter leur précieuse contribution et la pintade, elle, a perdu ses taches … Là encore, la nouveauté dans le choix des oiseaux et la grande diversité de leur représentation aident à valoriser l’apport unique et insubstituable de chacun·e dans la grande chaîne de la vie sur la planète.

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«Argento, le grand voyage» de Paul Kor (©Pastel) et «La légende du colibri» de Denis Kormann (©Actes Sud Junior)

Conclusion
C’est très réjouissant de découvrir cette diversité d’animaux provenant des quatre coins du monde. En effet, ce large éventail de propositions en langue française montre à quel point nous sommes tous concernés par la protection, urgente, de cette incroyable diversité, de cette richesse foisonnante déclinant la vie sous mille formes, dans un infini de possibles! Cette panoplie de belles et récentes publications titille notre curiosité tout en nous rappelant sans cesse que tous, nous appartenons à un même système et que nous sommes responsables de sa protection et de son bon fonctionnement.

Sans moralisation, juste en présentant la beauté de cette diversité infinie et les liens, parfois insoupçonnés entre eux, des règnes minéral, végétal et animal, ces publications incitent au respect, à l’admiration, à la contemplation et à la curiosité qui jamais ne sera totalement rassasiée... et c’est tant mieux! À nous, adultes, de mettre ces beaux ouvrages dans le plus grand nombre possible de mains. Mais encore et surtout, de nous responsabiliser, individuellement et collectivement, pour la sauvegarde de ce patrimoine inouï et incommensurablement précieux de la Nature sous toutes ses formes. Devenir alors ces passeur·euse·s de livres pour rapprocher des petites mains, des yeux curieux, du grand cœur des jeunes et de leur esprit encore disponible, ces belles pages de lecture d’un ici et d’un ailleurs, d’un avant, d’un maintenant et d’un prochainement… Un défi, énorme et urgent, à relever avec et pour ces animaux indispensables à la vie.


Bibliographie choisie

  1. 365 pingouins, de Jean-Luc Fromental et Joëlle Jolivet, Hélium, 2017 (réédition) (mathématiques, écologie)
  2. Argento, le grand voyage, de Paul Kor, Pastel, 2016 (amitié entre poisson et pélican et leur survol du monde)
  3. Barry: l’extraordinaire histoire d’un chien sauveteur, de Barbara Cratzius et Ursula Blancke, Baumgartner/Coppenrath, 2000; (histoire vraie d’un saint-bernard)
  4. Ça penche!, de Luc Turlan et Daniela Volpari, Marmaille et Compagnie, 2013 (humour, œuf de flamant, 1e envol)
  5. Djoudu, le petit yak perdu, de Noémie Pétremand et Jenay Loetscher, Paloma, 2016 (belle histoire de courage et de solidarité)
  6. Éphémère, de Frédéric Marais, Les fourmis rouges, 2012 (réflexion sur la durée de vie)
  7. Faites la queue!, de Tomoko Ohmura, L’Ecole des loisirs, 2011 (50 animaux sur le dos d’une baleine, classés du plus petit au plus grand, ouverture géante à l’italienne avec rabats panoramiques)
  8. Gérard le bousier, de Fred Paronuzzi et Andrée Pringent, Kaléidoscope, 2014 
  9. Gipsy, de Marie-France Chevron et Mathilde Magnan, Editions courtes et longues, 2014 (adoption d’une pie par un enfant gitan, magnifique et plein de valeurs)
  10. Grand corbeau, de Béatrice Fontanel, et Antoine Guilloppé, Sarbacane, 2007 (vision poétique et philosophique des couleurs)
  11. Je mange, je dors, je me gratte, je suis un wombat, de Jackie French et Bruce Wathley, Albin Michel Jeunesse, 2005 (idéal pour apprendre les jours de la semaine)
  12. L’aiguille de l’épervier: conte du Burkina Faso, de Bruno Tabuteau et Muriel Diallo, L’Harmattan, 2014 
  13. L’araignée qui ne perd pas son temps, d’Eric Carle, Mijade, 2009 (réédition) (toile en relief et style conte de randonnée)
  14. L’ascenseur de petit paresseux, de Tomoko Ohmura, L’Ecole des loisirs, 2016 (ouverture à la française)
  15. L’île aux crabes violonistes, Xavier Queipo et Jesus Cisneros, OQO, 2011 (envie de savoir)
  16. La baleine et l’escargote, de Julia Donaldson et Axel Scheffler, Gallimard Jeunesse, 2015 (voyage et géographie)
  17. La chorale de l’aube, de Suzanne Barton, Circonflexe, 2014 (un rossignol, ce chanteur du soir)
  18. La coccinelle mal lunée, d’Eric Carle, Mijade, 2010 (réédition) (passage du temps: journée et nuit, mais aussi plein de drôlerie compréhensible par les tout-petits)
  19. La dent, de Julien Perrin et Fred.L, Alice Jeunesse, 2014 (babouin qui se croit malin)
  20. La légende du colibri, de Denis Kormann, Actes Sud Junior, 2013 
  21. La tortue a besoin de nous!, de Chihiro Nakagawa et Junji Koyose, Rue du Monde, 2018; (illustrations surprenantes avec personnages minuscules)
  22. Le caméléon méli-mélo, d’Eric Carle, Mijade, 2001 (vouloir changer de vie, par jalousie, n’est peut-être pas l’idéal… avec découpes par animal et couleur, très originales)
  23. Le corbeau et les oisillons, de Nicole de Cock, Circonflexe, 2008 (solidarité entre une poule d’eau et un corbeau)
  24. Le grand ménage, d’Emily Gravett, Kaléidoscope, 2016 (blaireau)
  25. Les cacatoès, de Quentin Blake, Gallimard Jeunesse, 2007 (réédition) (humour de situation)
  26. Les p’tits escargots, de Fleur Daugey et Chloé du Colombier, Editions du Ricochet, 2021 (documentaire fort intéressant tout en simplicité)
  27. Maintenant que tu sais, d’Anne Crausaz, MeMo, 2011 (mouches, mille-pattes, musaraigne, crapaud et escargots)
  28. Moskito, d’Hélène Degroote, L’atelier du poisson soluble, 2009 (moustique super irritant)
  29. Mouettes, les vacances!, de Géraldine Collet et Caroline Pistinier, Philomèle, 2013 (beaucoup d’humour pour un journal de bord estival)
  30. Oh non, Geoffrey! de Gemma O’neill, White Star Kids, 2014 (girafon, illustrations magnifiques)
  31. Pas le temps, d’Anne Crausaz, MeMo, 2011; (fourmis et autres insectes nommés, dont le rhinocéros)
  32. Premier arrivé, premier servi!, de Tomoko Ohmura, L’Ecole des loisirs, 2019 (50 insectes de par ici qui grimpent dans un album s’ouvrant à la française)
  33. Qui a mangé?, d’Anne Crausaz, MeMo, 2011 (escargots)
  34. Susie, la petite oie qui en a assez d’être une oie, de Petr Horacek, Mijade, 2017 
  35. Susie, petite oie, regarde derrière toi!, de Petr Horacek, Mijade, 2017 
  36. Tancho, de Luciano Lozano, Les éditions des éléphants, 2022 (grues de Hokkaïdo, création d’un centre pour leur sauvegarde)
  37. Tous derrière le tracteur, de Yuichi Kasano, l’Ecole des loisirs, 2011 (oiseaux d’ici dans les champs)
  38. Un point c’est tout!, d’Helen Ward, Minedition, 2014 (graphisme très original avec reliefs pour une pintade jalouse)
  39. Wombat le super-héros, de Serenella Quarello et Julie Colombet, Sarbacane, 2021 (documentaire, mais sous forme d’histoire avec humour)

[1] Les numéros entre parenthèses renvoient aux livres cités dans la bibliographie.


Image de vignette: La légende du colibri de Denis Kormann (©Actes Sud Junior)


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