Rosalie et le Loup

Entre papillon et fraise des bois, Rosalie, la gourmande, bouquet en mains, se lèche les babines. En arrière-plan, l’ombre du loup, toutes griffes dehors.

Tout est vu. La couverture résumé de Tom Tirabosco synthétise l’histoire : deux personnages, trois temps, trois actes, la chasse aux papillons, la cueillette des fleurs et le repas de fraises !

Tout est vu mais rien n’est dit ! Dans un album de conte, la parole occupe la meilleure place.

Lorette Andersen donne vie aux personnages. Comme dans La Chèvre de Monsieur Seguin, quelqu'un veille sur l’héroïne. Ici, c’est sa mère qui l’appelle mais la fillette n’en a que faire. Tout à son plaisir, elle s’éloigne jusqu’à la forêt, lieu de tous les dangers. L’autrice ménage ses effets « là-bas, dans l’ombre, elle aperçoit des fraises des bois. » Le lecteur n’attendait pas cela. Patience, le loup arrive, bien gaillard, direct, debout sur ses deux pattes et estomaqué par tant de hardiesse. Car elle a de la répartie Rosalie et au loup qui s’approprie la nature sans vergogne ( « tu manges mes fraises, voleuse », « mes fleurs », « mes papillons ») la petite réplique : la nature est à tout le monde.

En trois images, Tom Tirabosco construit la tension dramatique : le loup tourne autour de la petite. Puis, sur la quatrième image, rouge vif, Rosalie s’engloutit dans la gueule grande ouverte de l'animal  !

La suite est hilarante de réciprocité : mange que je te mange. L’alternance entre « dévoreur » et « dévoré », où tantôt le loup avale la fillette, tantôt c’est elle qui le croque, se résout au bénéfice de Rosalie.

Le loup, avec une grande souplesse, enjambe la fenêtre et tout finit bien, mais que d’aventures !

Un conte plein d’astuce et de rythme. Décidément, les petites filles ne sont plus ce qu’elles étaient et c’est très bien comme cela.