Je sauve le monde dès que je m'ennuie

Eugène n’aime pas l’école, il n’y tient pas en place. Mais il a trouvé le moyen de s’évader : en pensée, il fait ce qui lui plaît. Pirate des Caraïbes, samouraï façon Naruto, sorcier en lutte contre le mal (non, pas sorcier, il déteste Harry Potter), spationaute à la découverte de nouvelles planètes, Eugène nourrit son imaginaire de ses lectures et des films de son enfance, malgré tout bien heureuse ! La maîtresse crie, les parents se lamentent : que va devenir Eugène s’il ne rentre pas dans les cases ? Un pédopsychiatre – qui, dans la tête du petit garçon, ressemble furieusement à King-Kong – se charge de rassurer la famille : Eugène n’est ni fou, ni destiné au chômage, il a juste besoin d’enchanter son quotidien… comme nous tous.

On ne s’attend évidemment pas à cette fin abrupte, en-dehors des conventions « pédagogiques » qui courent encore au sein de la littérature jeunesse. En accord avec les illustrations très dynamiques, le ton provocateur de ce petit roman entraîne dans une valse folle de songes farfelus. On peut être dérouté, mais pas longtemps car il est finalement très plaisant de se rêver des vies dorées. Le narrateur Eugène est un hyperactif qui tient plus que tout à sa liberté, et de cela, il est impossible de lui en vouloir. Parfaitement conscient de la différence entre illusion et réalité, il se révèle tout simplement… artiste en herbe ! Au milieu d’une morosité ambiante à laquelle les parents du petit héros n’échappent pas, cette ode à tous les cancres constitue un courant d’air frais très bienvenu.