Coeurs brisés, têtes coupées

Ezra Faulkner a tout pour lui : beauté, jeunesse, richesse. Il est intelligent, mais le cache à son lycée, préférant mettre en avant ses qualités sportives. Logiquement, il porte à son bras la plus jolie fille de son cercle doré d'amis. Un soir, elle le trompe. Déboussolé, furieux, Ezra rentre chez lui et a un accident de voiture. Il pourra remarcher, mais plus jamais jouer au tennis. Après un été solitaire, il retourne au lycée et recommence à fréquenter un ami d'enfance, devenu responsable du club de débats. Il y rencontre une nouvelle venue en Californie : Cassidy, brillante et différente...

Robyn Schneider joue avec les codes. Elle explore les us et coutumes des jeunes Américains, depuis les soirées arrosées jusqu'à la place importante du sport et de certaines matières inconnues en Europe dans le cursus scolaire. Nous sommes dans un milieu bourgeois, chaque adolescent conduit sa propre voiture mais cache également sa solitude derrière l'ironie. Elle se lance parallèlement dans un parcours psychologique que l'on sent cousu de fil blanc : comment le garçon superficiel apprend à connaître sa vraie nature à travers un accident et une rencontre (amoureuse). Le « je » d'Ezra est de rigueur, et, condition indispensable, il possède des capacités d'introspection qui vont bien au-delà de la façade qu'il présente aux autres.
Et puis, l'auteure va nous tenir en haleine en nous déroutant : Cassidy semble elle aussi cacher un lourd malaise, Ezra n'a pas totalement coupé les ponts avec son ancienne bande d'amis, le groupe des « populaires » comme celui des « intellos » cache des stratégies et des aigreurs internes... Qui protège qui ? Qui va aider qui ? La fin n'est absolument pas celle que l'on croit, en deux temps bien pensés qui scelleront certainement la fin de l'enfance. S'il s'agit bien d'un roman d'adolescence, d'un roman d'apprentissage, il sait promener sa petite musique originale, désenchantée, tout du long de son histoire, laissant le lecteur un peu assommé. Dans l'esprit, j'ai un peu songé à Nos étoiles contraires de John Green : non, vingt ans n'est peut-être et décidément pas le plus bel âge de la vie...