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Date de publication
Age-cible

Adieu la chair

Roman
à partir de 14 ans
: 284865158X
9.00
euros

L'avis de Ricochet

Un groupe de grands adolescents traîne son mal de vivre dans une ville qu’ils ont rebaptisée Here (ici en anglais). Ils se sont donné aussi des surnoms : Anjelina (la narratrice), Bianke, Aberdeen pour les filles, Ingo de Ring, Cœur-Coupant et Malt pour les garçons. Une nuit, sans que rien ne les y incite vraiment, ils se mettent à tuer des gens. Conscients qu’ils finiront par être découverts, ils s’enfuient à Budapest. Peu à peu, le groupe se disloque. Reste Anjelina, qui tourne la page en rencontrant une dénommée Camilla.

L’histoire est terrible de violence, sans concessions et sans espoir ; on pense au début d’Orange mécanique d’Anthony Burgess. Ici, les crimes resteront cependant impunis, et la seconde partie du roman dérive en un voyage d’apprentissage plus classique, mais tout aussi implacable. Car l’écriture de Julia Kino frappe, cadencée en phrases courtes, souvent nominales et/ou répétitives, utilisant un vocabulaire direct, interpellant le lecteur dans des scènes-choc. Rien n’est suggéré, tout se dit du même ton du constat, sans justification bien précise des actes (« On ne peut jamais savoir ce qui va se passer. Ce que faisaient les autres m’échappait, et je crois que ça m’a échappé jusqu’au bout. », pp. 15-16). La narratrice présente le récit comme un journal des événements écrit a posteriori, une façon pour elle de passer à une phase de sa vie plus constructive, mais sans qu’elle regrette le passé. Le ton adopté, tant dans la narration que les dialogues, est celui d’un adolescent type, avec des mots d’anglais et argotiques ; l’auteur a heureusement le recul et la maîtrise nécessaires pour que ce qui aurait pu être appliqué tombe toujours juste, sans envolées lyriques. Certes, les allusions à des grands classiques d’une littérature du spleen et à des groupes de rock à la réputation de rebelles abondent, mais suffisamment en cohérence avec l’atmosphère parfaitement réussie du désenchantement. Même l’amour s’y fait sans passion : Anjelina ne cherche pas d’amant, elle cherche des repères et Adieu la chair résonne comme un cri du cœur : « Mais laisse-moi te dire qu’il n’y a pas quarante façons de grandir. Il y en a deux mille. » (p. 37). Les extraits vidéo lus par la toute jeune auteure sur le site de la collection (http://www.exprim-forum.com) rendent encore la force du texte et valent le détour.