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Ricochet fait sa rentrée: 10 suggestions de lecture à glisser dans son cartable

Le Royaume de Minuit
31 août 2018

A l'occasion de la rentrée scolaire, nos rédactrices ont sorti leur plus belle plume pour vous proposer une sélection de livres sur le thème de l'école.


1. Henri est en retard, d’Adrien Albert, L'École des loisirs, 2016
Album, dès 3 ans

Malades, les parents d'Henri sont cloués au lit aujourd'hui. Contrarié, le bambin ordonne à son grand-père de venir le chercher. Les deux silhouettes filent à mobylette sur les routes de campagne, direction l'école. Mais de fortes pluies ont transformé la chaussée en lac, les obligeant à passer par un autre chemin. C'est l'occasion rêvée d'observer des marouettes, des panures à moustaches, des courlis corlieux et même un gigantesque silure. L'aventure continue en barque, puis… à dos d'élan!

Adrien Albert parvient à métamorphoser cette journée si mal commencée en une folle équipée au cœur de la nature avec une faune et une flore qui se déploient, quasi vivantes, sous nos yeux. Si le grand-père d'Henri savoure chaque instant, son petit-fils, lui, reste attentif au temps qui passe. Parce qu'il est hors de question d'arriver en retard à l'école, son endroit préféré! Un album brillant, majestueusement illustré par Adrien Albert, un auteur qui a le don de savoir parler aux enfants. (EP)

Henri est en retard

2. Le crocodile de l’école, de Christine Naumann-Villemin et Marianne Barcilon, Kaléidoscope, 2016
Album, dès 3 ans

Un crocodile à l’école? Voilà un élève surprenant. D'ailleurs, il est au bout du rang, à la fin d’une longue file d’enfants, «tout petit minuscule riquiqui petiot titi crocodile». La complicité de l’auteure et de l’illustratrice se joue dans cet équilibre entre le dessin et l’écriture. Pour rendre sensible la situation initiale du personnage principal, il faut cette kyrielle d’adjectifs minorants pour valoriser la position très inférieure du crocodile, la tête basse et le regard implorant.

Tout le récit va se construire autour de cette balance subreptice: le crocodile va devenir de moins en moins petit. Les adjectifs vont disparaître et le crocodile va occuper de plus en plus de place sur la page. Comment s’opère cette transformation? Par le jeu et l’intégration. Ce petit crocodile dans la cour de récréation ne sait pas jouer, « alors les enfants lui montrent ». La simplicité du texte accompagne la vie des enfants à l’école dans leurs activités. Ils dessinent, font du vélo ou mangent. Chaque fois, eux savent, mais pas le crocodile et chaque fois, «les enfants lui montrent». Le parti pris de modestie des situations et du vocabulaire est emphatisé par «Oh! Mais c’est une idée ou le crocodile a un peu grandi?».

Et oui, tout petit d’abord, à hauteur des enfants ensuite, énorme enfin: le récit progresse grâce à cette action innocente des élèves. Habileté suprême, lorsque tous à la piscine sont confrontés à l’habileté native du crocodile, on frémit à l’idée que les enfants assis dans les grandes dents de l’énorme crocodile pourraient être fort mal récompensés… Ouf!

On reconnaît le grand talent de Christine Naumann-Villemin et Marianne Barcilon dans leur description fine des activités et des mimiques des enfants, leur construction narrative très dynamique, leur humour et leur morale positive et légère des situations posées: c’est ensemble qu’on apprend, ensemble qu’on grandit! Affirmer avec tant d’élégance cette conviction recommande cet album aux petits à qui il est destiné, aux grands qui pourraient y apprendre quelques valeurs fondamentales sur l’apprentissage. (DB)

3. Le doudou de la directrice, de Christophe Nicolas et Maurèen Poignonec, Didier Jeunesse, 2016
Album, dès 3 ans

Que ce soit en littérature ou au cinéma, les directeurs ou directrices d'école sont souvent incarnés par des personnages austères, stricts et dépourvus d'humanité. On se souvient de la redoutable Mme Legourdin dans le roman Matilda de Roald Dahl... Ce n'est pas du tout le cas dans cette histoire où la directrice affiche une bonne humeur contagieuse et constante qui fait d'elle la personne la plus populaire de l'école. Comment fait-elle pour rester zen? Quel est son secret?

Un petit album carré qui permet de déculpabiliser les adultes et les enfants qui peinent à laisser tomber leur doudou. Comme un précieux talisman, cette jeune femme garde sa madeleine de Proust au fond d'une de ses poches. Pourquoi s'interdire le port d'une peluche si elle permet d'adoucir la vie? Une histoire fraîche et drôle à lire sans modération! (EP)

LE doudou de la directrice

4. La piscine, d’Antonin Louchard, Seuil jeunesse, 2018
Album, dès 3 ans

Mine renfrognée et sourcils froncés, le héros préféré d'Antonin Louchard essaie par tous les moyens d'échapper à la piscine. Après avoir vérifié qu'il était bien obligé d'y aller, ce petit lapin blanc liste à son enseignant les virus et bactéries (bronchite, otite, verrues plantaires…) susceptibles d'être attrapés dans l'eau. Après avoir écouté patiemment son élève, le maître, plutôt calé en matière d'humour, cloue joliment le bec à ce lapin aussi têtu qu'un âne.

Un nouvel opus aussi réussi que le précédent, Le pire livre pour apprendre le dessin, et créé sur le même modèle. L'enseignant n'est pas représenté et donne donc la possibilité aux enfants d'y mettre l'image qu'ils souhaitent. Les dialogues sonnent juste et on ne peut que saluer l'humour et la sagesse dont fait preuve l'enseignant face à cet élève récalcitrant qui n'est pas encore sorti de sa phase d'opposition! (EP)

5. Ils arrivent, de Sylvie Neeman et Albertine, La Joie de lire, 2018
Album, dès 4 ans

De nombreux albums traitent de la peur des enfants à l'heure de la rentrée des classes. Mais saviez-vous que cette appréhension touche également les enseignant-e-s? Avec une bonne dose d'humour et de suspense, Sylvie Neeman et Albertine se glissent dans la peau d'une maîtresse d'école stressée à l'idée de rencontrer ses nouveaux élèves qu'elle visualise aussi bruyants «qu'une famille de mammouths laineux galopant dans la steppe». La jeune femme les imagine tour à tour monstrueux, poilus ou souriants avec « des étoiles plein les yeux». Elle continue ainsi son cinéma jusqu'à l'arrivée de ces innocentes créatures appelées élèves.

Ce récit raconté du point de vue de l'enseignante permet de constater que cette peur de la rentrée concerne tout le monde et disparaît face à la réalité ou une fois partagée. Un album drôle et délicat à mettre dans toutes les mains (enfants et adultes) pour dédramatiser le délicat passage de la reprise des classes ou du premier jour d'école. (EP)

Ils arrivent

6. Le Snurtch, de Sean Ferrell et Charles Santoso, Alice Jeunesse, 2017
Album, dès 4 ans

Julie a un problème: son Snurtch n’arrête pas de faire des bêtises! Il gribouille, gigote, est grossier, l’empêche d’écouter la maîtresse. Et, bien sûr, c’est Julie qui se fait disputer. Quelle injustice! Mais lorsque la petite fille décide de parler à ses camarades de cette étrange chose qui lui fait faire n’importe quoi, ses amis sont tous du même avis: c’est la faute du Snurtch! D'ailleurs, ils en ont tous un.

Le graphisme très soigné des représentations des personnages humains diffère immédiatement du gros gribouillis informe que représente le Snurtch. Ainsi, l’image prend la suite du texte et l’on voit concrètement se mêler réel et imaginaire. Le lecteur se sent alors réellement convié au sein des pensées de Julie et se rapproche du personnage. Complice de ses confidences, il ne peut cependant s’empêcher de s’interroger: ce Snurtch existe-t-il réellement? Au sein de cette ambivalence qui n’a pas de conclusion, le lecteur peut savourer avec grand plaisir les nombreux gags des bêtises du Snurtch. Aussi, l’album laisse une ouverture pour inciter à penser que l’on peut sans doute essayer de le calmer, ce Snurtch qui représente la tentation suprême de la bêtise à réaliser. Mais, au fond, il est certain que chacun l’aime bien, ce Snurtch si attachant. (DM)

Le Snurtch

7. L'école de Zéline (T.1). La classe de maître Léon, d’Armelle Modéré, Sarbacane, 2017
Bande dessinée, dès 6 ans 

Pour mieux vivre son asthme, Zéline quitte la grande ville et va vivre chez ses grands-parents, dans la verte campagne. Là-bas, elle est scolarisée dans une classe unique, dont Maître Léon est le seul enseignant pour tous les niveaux. Quel changement! Il faut maintenant s’occuper des plus petits et laisser du temps pour chacun. Aussi, la nature peut davantage être observée: on peut soigner les petits animaux et même faire naitre des poussins.

Les animaux tout en rondeur, les tendres couleurs pastel et le découpage des vignettes en arrondi: tout forme un cadre accueillant et reposant, pour Zéline et pour le lecteur. Dans ce climat de tendresse, le jeune lecteur découvre ainsi une galerie de personnages très attachants: le petit Kiki, si petit parmi les grands de la classe et déjà confronté aux difficultés de la vie; le grand-père, qui transmet ses connaissances ou bien encore la jeune héroïne qui ne cesse de porter sur ce monde un regard neuf. Toute la magie des classes uniques de campagne est ainsi mise à l’honneur au fil des pages et le lecteur n’aura qu’une envie à la fin de sa lecture: devenir, lui aussi, un élève de la classe de Maître Léon. (DM)

8. Je suis en retard à l’école parce que…, de Davide Cali et Benjamin Chaud, Hélium, 2015
Album, dès 6 ans

En retard à l'école et, sans doute, pas pour la première fois, un enfant doit fournir à sa maîtresse des explications. Dit-il la vérité ou ment-il? La structure de cet album est simple. Il s'agit d'un récit en randonnée qui fait avancer le lecteur d'une situation à l'autre jusqu'au dénouement final, toujours au même rythme, avec de nombreux repères temporels ou spatiaux fournis par le texte. La construction des phrases, répétitive, évoque la progression obstinée de l'enfant en direction de l'école. En contraste, la représentation graphique des péripéties vécues par le héros plonge le lecteur dans un monde fou où cohabitent des gorilles amateurs de bus scolaires, des majorettes gigantesques, des moutons et l'avion personnel d'un président.

Le style de Benjamin Chaud se reconnaît au premier coup d'œil: beaucoup de mouvement dans le trait, des détails nombreux et de l'humour. Tandis que l'illustration s'étale presque en pleine page, le texte prend peu de place et ses quelques lignes évoquent un chemin bien droit.

Paru dans la bibliographie La lecture, c’est trop dur! Suggestions pour jeunes lecteurs en panne 2016 de l’Institut suisse Jeunesse et Médias ISJM.

Je suis en retard à l'école parce que...

9. La première de la classe est une extraterrestre, de Virginy L. Sam et Estelle Billon-Spagnol, La Martinière jeunesse, 2016
Album, dès 6 ans

Toutes les classes possèdent un ou une extraterrestre, un modèle d'enfant rare qui excelle dans toutes les disciplines. Que ce soit à l'orthographe, aux mathématiques ou à la gymnastique, cet élève particulier arrive toujours avec une longueur d'avance sur les autres. Pour ne pas perdre sa place sur le podium, il passe toutes ses récréations le nez plongé dans ses manuels scolaires. Jamais puni, cet Agnan revisité mange ses épinards avec le sourire à la cantine et récite par cœur et sans faute toutes les poésies apprises depuis la maternelle. Et si cet extraterrestre allait rejoindre sa planète…?

En poussant la caricature du premier de classe à l'excès, Virginy L. Sam et Estelle Billon-Spagnol se moquent avec humour des élèves parfaits. A travers ces différents portraits d'enfants qui jouent, crient, repeignent les murs en vert et se cassent le nez sur un problème de math, ce tandem fait l'éloge de la faiblesse. Un album richement illustré pour décomplexer les enfants, ceux qui oublient leurs affaires de gymnastique, tombent de fatigue à l'école ou rêvent d'enseignants en grève. (EP)

10. Le royaume de minuit, de Max Ducos, Sarbacane, 2016
Album, dès 8 ans

Dans l'école d'Achille, tous les enfants possèdent un don particulier. La spécialité du héros? Bêtises en tous genres. A la recherche de limites, ce garçon enfreint les règles de son établissement et se voit privé de liberté, enfermé (mais pas à clé) seul dans une pièce sombre. Achille attend d'être libéré, mais personne ne vient le chercher. Le soir est tombé, l'école est déserte, c'est l'occasion rêvée d'ouvrir l'armoire des objets confisqués. Achille est vite rejoint par Massimo, le fils du directeur. Les deux enfants, aux physiques très différents, passent un excellent moment entre batailles, chips et déguisements. La nuit, tous les jeux sont permis…

Imposant bâtiment à l'architecture singulière, perdu au milieu d'un écrin de verdure, l'école d'Achille en impose. C'est dans ce décor fantasmagorique, propice à tous les possibles, que se déroulent les aventures nocturnes de ces deux écoliers à l'imagination débordante. Si les salles de classes restent un territoire connu et rassurant, ce n'est pas le cas de la forêt où se cache un monstre agressif aux yeux jaunes… Après cette nuit mémorable, Achille (la terreur) et Massimo (le timide) deviennent inséparables. Un nouvel album signé Max Ducos, un auteur-illustrateur qui soigne le détail par de subtils cadrages pour raconter des histoires sorties tout droit de l'univers enfantin. (EP)

Le royaume de minuit


Les rédactrices: Danielle Bertrand (DB), Déborah Mirabel (DM), Emmanuelle Pelot (EP)