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Date

Pelton

1 juin 2002



Pauvre Zozzo, Bonne nuit, Zozzo président, c'est Pelton. Auteur-illustrateur Pelton publie peu, mais frappe à tous les coups. Par des images simplifiées, toujours malicieuses, Pelton invente une autre géographie, une nouvelle façon de dire. Rencontre avec cet illustrateur qui ne cesse de chercher...et de trouver






Ricochet : Pelton, comment est née l'idée de réaliser des livres pour enfants ?

Pelton : Je dessinais des petits bonhommes dans mon coin depuis plusieurs années, et puis j'ai habité Montreuil, à 200m de la place où se tenait le salon du livre pour enfants, j'y suis allé par curiosité, j'ai été émerveillé,...il y a eu une réaction chimique, j'ai organisé mes dessins pour que cela ressemble plus ou moins à des histoires pour enfants.

Ricochet : Dans votre premier album, Pour faire un ours bleu, choisir un beau lion..., vous utilisiez des à-plats de couleurs vives, en forme de vignette. On suivait les aventures de Léon l'ours bleu dans sa vie quotidienne. Pouvez-vous nous parler de ce premier album ?

Pelton : Cet album est la résultante de trois principes complètement arbitraires :

- des images qui contredisent le texte,

- des à-plats de couleurs inspirés de la palette de Matisse (j'suis pas trop prétentieux, ça va?)

- un personnage un tantinet idiot, mais attachant, Léon l'ours.

A partir de là, on a beaucoup discuté avec Christian Bruel (ex directeur du Sourire qui mord), du livre et des livres pour enfants en général : sa vision est très percutante, mais cela tout le monde le sait; l'album, lui, est un peu gauche (je crois que je peux dire cela de tous mes albums).

Ricochet : Etait déjà abordé le thème du jeu enfantin. Est-ce que selon vous le jeu caractérise surtout le monde de l'enfance ?
Je n'ai aucune théorie à servir sur le monde de l'enfance. Je déteste les
théories, les doctrines. Les enfants sont comme tout le monde, ils aiment
jouer, c'est évident. Nous aussi, on aime jouer, mais on n'en a plus le
temps, à moins qu'on joue à faire semblant de ne pas jouer.




Ricochet : Puis est arrivé votre héros Zozzo, plus proche de la bande dessinée, paru chez Rue du Monde. Alain Serres dit que c'est le seul ouvrage qu'il est reçu par la poste... Zozzo c'est tout à la fois Zorro et Zéro, le héros fabuleux et l'enfant naïf, comment est né ce nouvel héros ?

Pelton : Zozzo est né à toute allure, dans un bus qui me conduisait de la rue de Bagnolet à la rue du faubourg Saint-Antoine. Les idées me sont venues toutes faites, comme ça, en regardant par la fenêtre, en regardant mes voisins et la rue pleine de couleurs et d'animation. En rentrant à la maison, rue de la Réunion, je couchais les scénettes sur le papier avec un petit bâton trempé dans l'encre.

Ricochet : Zozzo n'est ni un humain, ni un extra-terrestre, un personnage hors du temps qui se confronte à notre actualité et notre quotidien, mais où chaque lecteur peut lui trouver une identité. Une autre façon de lire en somme ?

Pelton : Je ne sais pas si c'est une autre façon de lire, mais c'est peut-être une autre façon d'envisager le héros, absolument inattendu, irréfléchi, immature, maladroit et plein de bonne volonté, un peu comme nous tous, en somme.

Ricochet : Revenons sur Zozzo Président ! Celui-ci use et abuse de son pouvoir. Est-ce un livre politique ?

Pelton : C'est un livre incorrectement politique. Zozzo traverse la politique comme on traverse un sous-bois, il rêve, pense à autre chose; S'il n'y avait pas le bandit pour qu'il reprenne contact avec la réalité, Zozzo nous échapperait définitivement, hors galaxie. C'est peut-être grâce, ou à cause, de l'adversité qu'on est un peu sérieux, un peu adulte...




Ricochet : Dans Bonne Nuit, paru aux éditions du Rouergue, nous suivons un nouvel héros, Boris et, cette fois, avec un thème bien connu des jeunes lecteurs, le coucher. Comment vouliez-vous traiter ce thème si connu ?

Pelton : Je ne voulais pas traiter ce thème. je ne veux traiter aucun thème en particulier. Je me contente de mettre bout à bout les images fugitives qui encrassent certaines zones de ma boîte crânienne. Il en ressort, si je m'applique, une histoire. Par le plus grand des hasards (il y a des gens qui
disent que le hasard n'existe pas), cette histoire fait ressortir une thématique incontournable dans les livres pour enfants, une pure
coïncidence, je m'en excuse...

Ricochet : On croise également de nombreuses références, et notamment les contes célèbres (La Belle au bois dormant, le Petit Chaperon rouge). Est-ce selon vous toujours des références en matière de littérature de jeunesse ?

Là, il faut le reconnaître, on ne peut se dépêtrer de ces contes, de ces légendes archi-classiques. On n'est plus ou moins bercé et nourrit à cela à la naissance. Ces terribles histoires nous hanteront notre vie durant. Il est manifestement impossible d'y échapper et de ne pas leur manifester, de temps à autre, notre attachement. Ce n'est pas Bruno Bettelheim qui me contredira (d'autant plus qu'il est mort depuis quelques années déjà).

Ricochet : Pour conclure, quels sont vos prochains projets ?

Pelton : J'ai le projet global de renouveler sans cesse mes propositions. Y parviendrais-je?

J'ai le projet de ne pas m'ennuyer, de ne pas ronronner dans un style et dans un thème.

J'ai le projet de découvrir d'autres pistes.

J'ai le projet de rencontrer des gens qui partagent cette façon de voir.

J'ai le projet de rencontrer des gens qui ne partagent pas cette façon de voir, de m'enrichir de leur point de vue.

J'ai le projet de tisser un peu de relation, un peu de social, autour de cette activité, certes gratifiante, mais qui nous oblige à travailler seul, face à notre delirium tremens narcissique.



Les albums de Pelton

Pour faire un ours, choisir un beau lion, Le Sourire qui mord, 1995.

Pauvre Zozzo, Rue du Monde, 1998.

Bonne nuit, éditions du Rouergue, 2001.

Zozzo Président, Rue du Monde, 2002.

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