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Orianne Charpentier : « S’il y a bien une chose que j’espère susciter dans mes livres, c’est l’espoir. »

Nathalie Wyss
30 août 2017

Avec Rage, son dernier roman paru aux éditions Gallimard jeunesse, sélectionné pour le Prix RTS Littérature Ados, Orianne Charpentier aborde avec brio et puissance les thèmes de la reconstruction et de l’espoir. Une très belle réussite dont on ne ressort pas indemne.


Orianne Charpentier
© Catherine Hélie pour Gallimard

 

Nathalie Wyss : Quand et comment avez-vous commencé à écrire ?

J’ai envoyé mon premier manuscrit à Gallimard l’année de mes dix-huit ans : il a été refusé, comme les trois autres qui ont suivi ! Mais j’avais commencé bien avant : enfant, je noircissais des cahiers avec des histoires de sorcières et de naufragés sur une île… Je crois que, dès que j’ai compris ce qu’était un récit, j’ai eu envie d’en écrire. Mais cela m’a pris du temps avant d’y parvenir.

 

Qui vous racontait des histoires lorsque vous étiez enfant ?

Il me semble que Maman nous en lisait, à ma sœur, mon frère et moi. Mais j’adorais aussi écouter les histoires que ma mère et ma grand-mère (la mère de mon père) se racontaient entre elles, pendant les vacances d’été, quand elles nous croyaient en train de jouer ou endormis. Des histoires vraies d’autrefois, que je ne comprenais pas toujours, mais qui étaient pleines de mystères et d’étrangetés à mes yeux.

 

Rage, c’est le surnom du personnage principal de votre roman éponyme, une jeune exilée que le lecteur suit pendant une nuit. Lors d’une soirée où elle n’arrive pas à faire sa place, elle fuit au jardin et croise la route d’un chien maltraité, blessé, et dont elle décide de s’occuper.

Dans une interview, vous avez dit que « tout livre est une tentative ». Quelle a été la vôtre pour ce roman ?

Je voulais que, sans rien connaître de cette jeune fille, ou très peu, on ressente ce qu’elle éprouve…  J’ai espéré qu’on lirait ce livre comme une urgence, comme s’il y avait le feu. Ma tentative, c’était ça : écrire un roman qui serait comme un charbon ardent, qui brûle un peu et, aussi, qui réchauffe.

Rage

On ressort de Rage rempli d’un fol et bel espoir, est-ce ce sentiment que vous vouliez faire naître chez les adolescents. Quel est votre rapport à l’adolescence et aux adolescents ?

Merci pour ce que vous dites ! S’il y a bien une chose que j’espère susciter dans mes livres, c’est l’espoir. Peut-être parce que justement, je crois que l’adolescence est un âge où l’on en manque parfois… Je me souviens que, lorsque j’avais quatorze ou quinze ans, je pensais à ma vie à venir, et j’avais peur de ne pas réussir à trouver qui j’étais, à aimer, à devenir adulte… Je mets en scène ces peurs-là dans mes livres, et j’essaie de permettre à mes personnages de trouver leur propre force.

 

Dans votre roman, Rage est surnommée Antigone, en référence à l’héroïne tragique, par l’un des personnages. Est-ce ainsi que vous la voyez ?

Rage et Antigone ont en commun d’être de très jeunes femmes, et d’avoir subi la guerre. Et comme Antigone, Rage se retrouve confrontée à un choix impossible, entre une loi extérieure et une loi intérieure… Mais plus généralement, il y a dans Rage des allusions aux mythes grecques : le Sphynx ; Cerbère, le chien des enfers... A la fois parce que ces mythes sont intemporels — ils parlent de la condition humaine — et aussi parce qu’aujourd’hui la Grèce accueille de nombreux réfugiés.

 

Pourquoi avoir choisi la figure du chien autour duquel tourne le récit ?

Pour être honnête, je n’ai pas vraiment choisi le chien : il s’est imposé à moi, tout comme le personnage de Rage…

 

Les thématiques de vos livres ne sont pas toujours gaies. Comment les sujets viennent à vous ?

Oui, vous avez raison ! Mais, comme je vous le disais, je n’ai pas l’impression de choisir le thème de mes romans, je crois plutôt que ce sont les personnages qui me choisissent. C’est comme cela que mes livres naissent : un jour, une image me vient, je vois une scène avec des gens — et cette image est si forte et si éblouissante, et les personnages me semblent si réels, que je ne peux pas m’en détourner. Pour Rage, j’ai vu surgir une jeune fille et ce chien ; et l’un était le miroir de l’autre. A partir de ce moment, ils sont restés en moi, ils sont devenus moi, durant tout le temps de l’écriture. J’avais besoin de leur donner une voix. Alors j’ai cherché mes mots, ceux qui me semblaient justes pour eux… et j’ai écrit le livre.

 

Quels sont vos projets d’écriture ?

J’essaie de finir un roman depuis des mois et des mois — un roman très différent de tous ceux que j’ai déjà écrits… Mais c’est comme s’il m’échappait : je n’arrête pas de tout effacer pour tout recommencer ! Pardon si je ne vous en dis pas plus : j’ai l’impression que, si j’en parle trop, il va s’envoler vraiment…

 

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