Critiques en herbe: 9 BD et mangas conseillés par des élèves vaudois·e·s
L’alchimie, la beauté ou encore la dépression: autant de thématiques qui ont suscité la curiosité des élèves d’une classe de première année du gymnase de Renens. Durant le printemps 2024, un projet mené par une enseignante de français, Camille Schaer, a eu pour but de travailler sur la bande dessinée et le manga. Chaque élève de la classe a choisi une œuvre dans la bibliothèque du gymnase, avant d’en livrer sa lecture par le biais d’un compte rendu critique. Neuf de ces vingt-trois travaux sont publiés ici. Les élèves espèrent que leur travail permettra de promouvoir la lecture de bandes dessinées auprès de jeunes adultes.
L’alchimie, la beauté ou encore la dépression: autant de thématiques qui ont suscité la curiosité des élèves d’une classe de première année du gymnase de Renens. Durant le printemps 2024, un projet mené par une enseignante de français, Camille Schaer, a eu pour but de travailler sur la bande dessinée et le manga. Chaque élève de la classe a choisi une œuvre dans la bibliothèque du gymnase, avant d’en livrer sa lecture par le biais d’un compte rendu critique. Neuf de ces vingt-trois travaux sont publiés ici. Les élèves espèrent que leur travail permettra de promouvoir la lecture de bandes dessinées auprès de jeunes adultes.
1. Je vais mieux, merci: vaincre la dépression, de Brent Williams et Korkut Öztekin, Tchou, 2018
Je vais mieux, merci est une bande dessinée écrite par Brent Williams, un avocat et réalisateur néo-zélandais né en 1958 à Wellignton, et mise en images par Korkut Öztekin, né en 1976 en Turquie. À travers ce livre, l’auteur retrace sa vie: il parle de sa dépression et du chemin qu’il a parcouru. Il montre son vécu, sans filtre, en disant clairement ce qu’il a ressenti ou même pensé durant cette période. Son récit est renforcé par les illustrations fortes et symboliques de Korkut Öztekin.
Cette bande dessinée très touchante parle d’une maladie compliquée mais également taboue, dont tout le monde peut souffrir. Grâce aux aquarelles, le texte du narrateur est encore plus émouvant. Brent Williams explique toutes les étapes par lesquelles il est passé comme le déni, le désespoir, la peur ou même le fait de reconnaitre qu’il a besoin d’aide. L’auteur écrit des mots puissants pour décrire ses pensées comme: «Ressaisis-toi !» (p.9) ou encore «Je ne vais jamais m’en sortir» (p.12). Il montre que la guérison est un chemin long qui demande beaucoup d’efforts. En écrivant cette bande dessinée, il espère apporter du soutien et des encouragements à toutes les personnes qui vivent la même situation que lui, tout en leur montrant qu’elles ne sont pas seules dans leurs combats. La dépression est une maladie que l’on ne peut pas ignorer et, pour s’en sortir, il ne faut pas avoir honte de demander de l’aide.
Maëlle
2. True Beauty, de Yaongyi, Kbooks, 2021
True Beauty est un webtoon sud-coréen qui raconte l’histoire de Ju-Kyeong, une adolescente qui maîtrise l’art du maquillage. Cela lui permet de cacher sa réelle apparence pour laquelle elle est victime de critiques et d’intimidation. L’intrigue se développe tandis que Ju-Kyeong jongle entre son image fabriquée et les défis de la vie quotidienne, explorant des thèmes tels que la confiance en soi et la pression sociale. En effet, la jeune fille se rend compte de l’importance de la beauté pour la société et l’amour lorsqu’elle souligne: «Bien sûr, c’est mon visage le problème! Personne ne voudrait sortir avec une fille moche et banale comme moi.»
Ce webtoon se démarque par sa capacité à captiver les lecteur·rice·s à travers sa narration riche et ses illustrations exceptionnelles. L’exploration de thèmes comme l’acceptation de soi ou les défis sociaux crée une connexion émotionnelle forte avec les personnages. D’après la protagoniste, la beauté est synonyme de relations sociales: «Quand elles verront ça, toutes mes amies me lâcheront», dit-elle en parlant de son apparence naturelle.
La manière dont l’histoire aborde la beauté intérieure et extérieure tout en traitant des problèmes contemporains qui y sont liés rend la lecture non seulement divertissante mais également propice à la réflexion. Les dessins détaillés et expressifs de type manga-réaliste apportent une perspective visuelle saisissante à l’histoire, renforçant l’impact émotionnel.
True Beauty offre une expérience immersive qui laisse une impression durable.
Sneha
3. Jessica Jones, de Brian Michael Bendis, Michael Gaydos et Matt Hollingsworth, Panini Comics, 2017
Jessica Jones est une série de bandes dessinées en six volumes, à mi-chemin entre le thriller et le comic de super-héros.
Le premier tome met en scène Jessica Jones, une ancienne détenue. Sortie de prison, la protagoniste se penche sur une affaire captivante, au cours de laquelle elle devra aider une femme à comprendre ce qui ne va pas avec son mari. L’œuvre aborde des thèmes sombres et profonds tels que la violence et le meurtre: «Mais pour moi, la tuer et boire son sang était le summum de l’horreur». Ces paroles sont prononcées par un mystérieux personnage, dénué de sentiments. Les illustrations de Michael Gaydos accompagnent la bande dessinée avec leurs couleurs sombres. Les dessins détaillés présentent les affrontements et les émotions des personnages. La disposition des cases est stratégique, elle permet de fournir des indices visuels et apporte des moments de tension et du dynamisme à l’histoire.
La lecture de Jessica Jones est fascinante. Le récit comporte beaucoup de suspense, ce qui pousse le lectorat à se questionner sur la suite. Jessica Jones est une femme courageuse, avec un très grand sens de l’humour, même dans les situations dangereuses: «T’as un goût de cheese-burger. Lave-toi les mains», dit-elle après avoir croqué le bras de son ravisseur. Ce passage montre que, malgré les scènes violentes, il y a des moments très drôles.
Des personnages bien développés, une intrigue palpitante, une qualité impressionnante des illustrations et une atmosphère originale font de l’œuvre une bande dessinée réussie.
Eldina
4.Tsugumi Project, d’Ippatu, Ki-oon, 2019
Tsugumi Project est un manga de type seinen. Il raconte l’histoire de Léon, un condamné à mort, contraint de participer à une mission secrète pour pouvoir retrouver la liberté et espérer revoir sa femme un jour. Comme le dit le capitaine dans ce texte: «Vous voulez des droits ? Vous avez un moyen et un seul d’en gagner… Et je vais l’exposer!» (p.32). La mission consiste à récupérer une arme puissante qui se cacherait dans les ruines du Japon, détruit deux siècles auparavant. Les prisonniers doivent y rester un an pour mener à bien leur mission, ensuite leurs peines seront effacées. Cependant, l’avion dans lequel ils se trouvent s’écrase violemment; Léon et les autres détenus sont dispersés dans la baie de Tokyo. Le jeune homme est maintenant seul, sans eau ni nourriture pour pouvoir survivre. Il va devoir faire face à de nombreux dangers auxquels il ne s’était pas préparé.
Cette bande dessinée japonaise offre une plongée captivante dans un monde postapocalyptique où la survie est une lutte quotidienne. L’un des points forts du manga réside dans son atmosphère immersive et sa capacité à créer un monde dévasté mais intrigant à la fois. Les descriptions des ruines du Japon sont détaillées, permettant aux lecteur·rice·s de se sentir véritablement immergé·e·s dans cet univers sombre et hostile. De plus, le personnage principal offre un point d’ancrage solide pour le récit. Son combat pour réussir son plan et sa quête pour retrouver sa liberté ajoutent une dimension émotionnelle puissante à l’histoire: « Pas question… que je meure dans ce trou paumé!» (p.32).
Matilde
5. Lady Di & Me, de Jean-Claude Bartoll et Yishan Li, Glénat, 2017
«Oui. Vous avez bien entendu… Lady Diana aurait été assassinée!» (P.104).
Le livre Lady Di & Me présente deux histoires parallèles, l’une centrée sur la vie de Diana, et l’autre sur celle de Marie-Lihn, journaliste suivant Diana depuis les années 1980, qui devient son amie et confidente au fil du temps. L’histoire illustre la vie de Diana et sa mort. Les images du livre adoptent un style réaliste, avec des touches de manga. La couleur rouge est omniprésente, mettant en valeur le personnage de Diana et sa tragique symbolique tout au long de l’ouvrage. Certains passages sont particulièrement poignants. «Pourquoi il ne m’aime pas? …mais POURQUOII?» (p.67): cette citation, par exemple, révèle la profonde recherche d’affection et de validation de la princesse. Tandis que le passage suivant illustre le désir de Diana de retrouver une certaine normalité dans sa vie médiatisée: «Si je pouvais prouver à la terre entière comment je suis traitée!!!» (p .68).
Lady Di & Me est un livre très captivant. L’intrigue est pleine de suspense, et ce livre est très touchant par le récit de la dépendance affective de Diana. Il est émouvant de voir à quel point elle donnait beaucoup d’elle-même sans recevoir en retour. La façon dont elle est représentée dans l’ouvrage est triste, et il est troublant de constater qu’elle a finalement trouvé la mort dans des circonstances si tragiques. Un sentiment d’isolement et de désespoir habitait Diana à certains moments de sa vie, ce qui transparaît très bien dans l’ouvrage.
Hanan
6. C’est comme ça que je disparais, de Mirion Malle, La ville brûle, 2020
C’est comme ça que je disparais est une bande dessinée de fiction contemporaine où Mirion Malle parle de sentiments et de ressentis sur la vie de tous les jours. Dans cette œuvre, l’autrice explore la dépression et l’anxiété. Elle utilise des illustrations évocatrices pour partager les luttes intimes de l’héroïne de l’histoire, ainsi que ses moments de réflexion et de croissance personnelle qui l’ont aidée à surmonter ses difficultés. Au fil des pages, nous pouvons suivre la vie quotidienne de Clara, le personnage principal, qui traverse plusieurs difficultés, telles que la dépression, les chagrins d’amour et les troubles mentaux. L’autrice décrit bien les pensées de Clara sur sa dépression et ses problèmes mentaux avec cette phrase: «En ce moment, tout est juste trop vide et trop plein en même temps». La citation fait comprendre l’état psychique de Clara en mettant en valeur le vide dans lequel elle est plongée. Le style graphique de la bande dessinée est assez minimaliste et expressif, caractérisé par des lignes simples, avec une attention particulière portée aux expressions faciales.
La bande dessinée est facile à lire et soulève des aspects de la vie dont on ne parle pas ou peu. Clara partage ses désirs avec cette phrase: «Je voudrais être légère et insouciante, je voudrais avoir le droit de ne pas lutter constamment», soulignant que dans sa vie elle doit se battre pour parvenir à survivre. Les images de la bande dessinée permettent de réaliser à quel point il est possible de détruire quelqu’un. Elles retranscrivent les expressions faciales des personnages et mettent en valeur certains signes relatif à la dépression, comme les larmes, les cernes et le regard vide. Le livre est très intéressant et fait réfléchir sur des sujets sensibles de la société.
Yamouna
7. Adieu Eri, de Tatsuki Fujimoto, Crunchyroll Kaze, 2023
Adieu Eri est un manga shōnen qui se distingue par son exploration introspective et émotionnelle du deuil, ce qui n’est pas commun pour un genre connu majoritairement pour l’action. Dans ce manga, nous suivons Yuta, un jeune garçon faisant face à la perte de sa mère. Le garçon fera un documentaire sur sa mère et lui, comme moyen de faire face à ce deuil. Yuta présentera son film à sa fête de lycée, mais malheureusement ses camarades se moqueront de lui. «Je pense parler au nom de tout le monde... Je peux garantir que chanter après avoir maté un film aussi pourri, c’est chaud! Sérieux!» (p. 26). Ces paroles sont prononcées par le chanteur passant après le film de Yuta. Après ce fiasco, Yuta rencontre Eri, une jeune femme de son lycée passionnée de cinéma. Elle aidera le jeune homme à créer un meilleur film, tout en se liant d’amitié avec lui...
Ce manga est surprenant que cela soit par les émotions, les thèmes abordés ou encore l’évolution de l’histoire. «Ta mère m’a dit... qu’elle voulait que tu la filmes. J’évoque sa mort». Des mots impactant pour le lecteur et le protagoniste, montrant que la mère veut laisser une trace d’elle, malgré les circonstances. Cet ouvrage essaie d’aborder le deuil différemment, ce qui est bien dans l’idée mais qui aurait pu être mieux réalisé. Les dessins restent agréables à regarder en mélangeant détails et simplicité. Pour conclure, ce manga est surprenant en matière d’histoire ou de thèmes abordés. Un ouvrage sympathique à découvrir pour les curieux et les cinéphiles.
Lukas
8. Fullmetal Alchemist, de Hiromu Arakawa, Kurokawa, 2005
Vous êtes intrigué·e par l’alchimie et vous voulez en savoir plus? Ce livre est fait pour vous!
Fullmetal Alchemist est un manga qui parle de la vie des deux frères Elric, Alphonse et Edward. Ces derniers ont fait une expérience qui a tourné au drame, au cours de laquelle ils devaient sacrifier quelque chose, comme le montre le texte à plusieurs reprises: «ainsi on ne peut rien obtenir sans faire de sacrifice», «les enseignements qui se font sans douleur n’ont pas de réelle valeur». On sait qu’après l’accident, Alphonse a perdu son corps mais qu’il est en vie, car son âme est dans un corps en fer. Edward, lui, a perdu sa jambe et son bras. Les deux protagonistes sont à la recherche de la pierre philosophale qui leur permettra de récupérer les parties du corps qu’ils ont perdues. En chemin, les Elric rencontreront beaucoup d’obstacles et des problèmes; certaines personnes essaieront de les ralentir dans leur quête.
Ce manga a un graphisme plutôt réaliste. L’histoire, remplie de suspense, est palpitante. La motivation qu’ont les deux frères et inspirante, car ils sont à la recherche d’une pierre qu’ils ne sont même pas sûrs de trouver.
Hermon
9. Le jour où le bus est reparti sans elle, de BeKa, Marko et Maëlla Cosson, Bamboo édition, 2016
Le jour où le bus est reparti sans elle est une bande dessinée qui raconte l’histoire de Clémentine, une jeune femme déterminée à se reconnecter à elle-même. En s’inscrivant à un séminaire de méditation, elle sera confrontée à plusieurs leçons de vie et se donnera un but dans l’existence. Mais ce voyage ne se passe pas comme elle l’avait imaginé. Durant cette semaine, elle rencontrera Antoine qui l’accueillera chez lui. Il lui racontera de belles histoires, ce qui encouragera Clémentine à se reprendre en main. Cet homme, rempli de sagesse, lui fera reprendre confiance en elle. Il explique: «mais la difficulté, c’est qu’il n’y a pas de ligne d’arrivée. [...] La vie vient sans cesse malmener nos certitudes, ce sur quoi nous nous sommes construits jusque-là...» (p.52).
Cette bande dessinée est très bien écrite, les dialogues sont fluides. Les dessins sont très colorés et remplis de détails, ce qui rend la lecture très agréable et captivante. Le livre propose des réflexions intéressantes: «[..] La vie n’est qu’un livre rempli de questions et l’expérience un livre rempli de réponses. C’est sans fin...» (p.66). Tous ces mots rendront Clémentine plus sage, zen et détendue. C’est ce qu’elle recherchait finalement.
Emma