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Claude K. Dubois

1 novembre 2005

A l’occasion de la sortie d'une nouvelle série intitulée " Les petits bobos de la vie " dans la collection Lampe de poche de Grasset jeunesse, Claude K Dubois, auteur et illustratrice pour la jeunesse depuis une vingtaine d’années, était au Salon du livre de jeunesse Namur où elle dédicaçait ses dernières sorties. Nous l'avons rencontrée.




Un univers de chaleur et de tendresse



Claude K Dubois, auteur et illustratrice pour enfants belge, a signé plus d'une cinquantaine de titres seule ou en collaboration. Citons la série Lola réalisée avec Carl Norac, "Puni-cagibi", "Puccini canari de Paris", "Petit lapin rouge", "Un papa d'aventure", "La Terre de Juana" parus chez Pastel , la série Arthur cosignée avec Gudule éditée par Nathan, "L'étoile de Léa" aux éditions Averbode ou plus récemment "J'ai très peur", "Que se passe-t-il, Théophile ?" ou encore "Je ne veux plus pêcher avec papa !" chez Pastel. Née à Verviers en Belgique, cette illustratrice aux yeux clairs a suivi les cours de l'institut des Beaux arts de Saint-Luc à Liège. Elle y enseigne aujourd'hui le dessin, peint, réalise des sculptures et des albums pour la jeunesse dont la liste s'allonge sans faiblir. Elle répond ici à nos questions !



Ricochet : Vous venez de publier chez Grasset jeunesse deux titres dans la collection " Lampe de poche " avec le docteur Eric Englebert, médecin et thérapeute Eriksonien. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce projet ?

Claude K. Dubois : Dans le cadre de son travail, Eric Englebert écrit des contes thérapeutiques pour ses patients, des contes non publiés qu'il m'avait un jour montrés. Nous voulions parler aux enfants à propos de problèmes concrets, parler des petites choses de la vie et pouvoir mettre des mots sur les émotions des enfants. Il appréciait mon dessin qu'il trouvait assez expressif. Et de mon côté, cela m'intéressait de décrire les émotions chez les enfants, car les émotions sont bien plus fortes chez les enfants que chez les adultes. Ils se laissent plus aller. C'est donc merveilleux de pouvoir les rendre !


Ricochet : Pourquoi avoir choisi la collection "Lampe de poche", une collection de roman ?

Claude K. Dubois : C'était un choix de notre part en accord avec l'éditrice et cela a son importance. Ce sont comme de petits romans. C'est donc moins important que l'album cartonné en tant qu'objet et cela donne un ton plus direct. C'est donc plus jeté, plus accessible ! C'est comme un petit contact, une sorte de petit journal.

Ricochet : Vous êtes auteur et illustratrice, mais il vous arrive d'illustrer le texte d'autres. Je pense notamment, pour n'en citer que quelques-uns, à Gudule, Rascal, Carl Norac, Patrick Gilson, Maïa Brami, Colette Hellings, Alain Serres, Claire Mazurel, Claude Lager, Laurence Bourguignon... Quelle démarche préférez-vous et y a-t-il des rencontres qui vous ont marquées ?

Claude K. Dubois : J'ai exactement le même plaisir dans un cas ou dans l'autre. Il y a une série de livres que j'aime beaucoup et que j'ai réalisés seule et qui sont plus intimistes. Comme par exemple "Un papa d'aventure" ou encore "Taïh ", ces livres m'ont permis d'aborder des thèmes plus philosophiques comme la solitude, être soi-même... Quand je travaille avec d'autres, j'entre dans leur monde et j'entre en accord avec ce nouveau monde. Je peux peut-être exprimer des choses que j'aurais peut-être pas pu trouver moi-même et c'est amusant d'être en contact avec un autre univers.

Chaque rencontre a été importante pour moi et m'apporte beaucoup. Quand j'ai travaillé avec Rascal par exemple, j'avais réalisé des livres qui racontaient plus le quotidien et cela m'a permis de plus décaler mon dessin, de faire des choses plus intimistes, de pouvoir aller plus dans ce sens. Avec Carl Norac, c'était une très chouette rencontre et on a fait Lola dans un esprit plus affectif. Gudule, je l'apprécie pour son côté humoristique.

Ricochet : Justement le personnage de Lola, ce petit hamster ("Les mots doux ", " L'île au câlins ", " Un bisou, c'est trop court ", " Bonjour, mon petit coeur ",... ) Que représente-t-il pour vous et comment est né le projet ?


Claude K. Dubois : En fait, au départ, c'était un projet qui ne devait pas déboucher sur une série. Carl a inventé une histoire d'une petite fille qui s'appelait Lola qui avait la difficulté de sortir les mots de sa bouche. J'aime beaucoup ces histoires. Lola c'est tout mon côté affectif, je peux mettre tout là-dedans. Par rapport à ce personnage, je me souviens qu'une maman est venue une fois me voir et m'a raconté que son enfant s'était mise à parler après avoir lu le livre. Cela m'avait beaucoup touchée…

Ricochet : Etes-vous née avec un crayon dans la main ? Quel est votre parcours ?


Claude K. Dubois : Mon père dessinait, réalisait des aquarelles et je dessinais avec lui étant enfant. On allait faire des aquarelles et des croquis.. C'est une façon de m'exprimer enfant. J'étais secrète et je pense que je m'exprimais mieux avec les images. Ensuite, j'ai fait mes études à l'institut Saint-Luc à Liège. Et puis j'ai commencé, parallèlement à mes études, à travailler pour la presse. J'ai travaillé pendant deux trois ans pour les éditions Averbode dans la presse. A l'époque, on ne parlait pas spécialement du livre de jeunesse, mais c'est à cette époque-là que je l'ai découvert. Et cela m'a donné envie de m'adresser aux enfants. Puis un jour, je me suis décidée à franchir le pas. Je suis allée chez Duculot où j'ai rencontré Christiane Germain. Elle appréciait mes dessins et on a commencé un projet. Mais elle a dû quitter la maison pour fonder les éditions Pastel. Et je l'ai suivie. Voilà comment je suis devenue l'une des trois premiers auteurs de chez Pastel.



Ricochet : Chez Pastel en 2005 sont sortis deux albums "Je ne veux plus pêcher avec papa" et "Que se passe-t-il, Théophile ?" que vous avez réalisés seule. Comment sont nées ces histoires ?


Claude K. Dubois : "Je ne veux plus pêcher avec papa" est né d'un de mes souvenirs. Petite, mon papa m'emmenait à la ferme et j'adorais. Puis un jour cela m'a ennuyé et je n'ai pas su lui dire. Je me disais que j'allais lui faire de la peine et je culpabilisais. Pour " Que se passe-t-il, Théophile ", je suis partie de ce que m'avait raconté un ami qui, enfant, avait manqué d'affection de sa maman. Cela m'avait beaucoup émue et j'ai écrit cette aventure. J'aime beaucoup cet album qui a à la fois un ton humoristique et qui est aussi en même temps une histoire assez forte. L'idée de base est assez banale finalement : il vaut mieux avoir de l'affection que des objets. C'est aussi un livre qui parle de l'attente des petits enfants.

Ricochet : Si vous deviez caractériser votre empreinte graphique, vis-à-vis de qui vous sentez vous proche du point de vue du trait ?


Claude K. Dubois : Mes premiers émois artistiques, je les dois à Sempé et aux peintres impressionnistes. A la fois par la lumière et les aquarelles. Ce sont là mes deux sources. Il y a aussi tous les illustrateurs anglais que j'aime beaucoup.

Ricochet : Dans certain album, votre trait rappelle Gabrielle Vincent aussi...


Claude K. Dubois : Oui, c'est vrai qu'on me le dit souvent et j'admire son travail. Pour moi, ce style, je le rapproche des Anglais dans un esprit assez réaliste, assez croquis, assez livré. J'aime bien le côté expressif de ces dessins-là qui sont des dessins enlevés au crayon ou à l'aquarelle en général. Ils sont très vivants et très expressifs. C'est un style de dessins qui permet l'expression par le corps et le visage et le trait inachevé donne une vie aussi. Vu que le trait n'est pas fini, cela bouge un peu, comme si cela vibrait. Et c'est cela qui me rapproche des impressionnistes au départ, mais je suis plutôt expressionniste par mes goûts !


Ricochet : Quand on regarde tous vos titres, on a l'impression de déceler des différences de style, comme des ruptures entre des titres comme Puni-cagibi, Un papa d'aventure, Taïh, Toto et puis d'un autre côté, "Arthur", "L'étoile de Léa", "Je m'ennuie",....


Claude K. Dubois : Pour moi, ce n'est pas si différent. J'adapte mon style au sujet. Par exemple, pour " Puni-cagibi ", "Taïh", c'est de l'aquarelle. Des dessins comme Arthur, c'est un peu différent. Je sais faire autre chose que de travailler à l'aquarelle, donc c'est amusant pour moi de m'essayer parfois à autre chose. Par exemple chez Pastel, " Que se passe-t-il, Théophile ? " ou " Je m'ennuie " : c'est pour moi l'occasion de changer et j'aime bien : c'est dynamique, c'est amusant.


Ricochet : Le personnage d'Arthur inventé par Gudule et qui vous doit ses traits, que représente-t-il pour vous ? Pouvez-vous nous le décrire ?


Claude K. Dubois : Arthur, il me fait rire ! Je l'aime bien, il est vraiment rigolo. Dans la série des Arthur, il y a de la tendresse et surtout beaucoup d'humour. Il a ce côté un peu énervé qu'ont parfois les enfants. Il est mignon, tout plein d'idées, il s'énerve, il a l'air un peu ahuri aussi. Je l'aime bien : il est plein d'entrain !

Ricochet : Y a-t-il des thèmes que vous aimez davantage traiter ?


Claude K. Dubois : Je ne pense pas en termes de thèmes à traiter. En fait, je ne dessine pas pour le côté graphique je dessine pour traduire l'émotion et la partager. Ce qui m'anime, c'est de parler des sentiments intérieurs des personnages, de leurs questions face un monde, de leurs étonnements. On ne comprend pas tout quand on est petit et j'aime traduire cela dans les yeux, d'y mettre quelque chose d'un peu fort pour parler des incompréhensions du plus jeune quand il tombe dans le monde, quand il essaie de comprendre ce qui l'entoure et tente de se débrouiller. L'enfant est dans un monde qui le dépasse. Il ne sait pas comment faire, il agit à sa façon.

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Illustration d'auteur

Claude K. Dubois

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