Les vies d'Avril

Avril pourrait suivre une existence moyenne, si le divorce de ses parents et l'adolescence ne s'en étaient pas mêlés. Perturbée par les évolutions sociales radicalement différentes de sa mère (riche et rigide) et son père (bohème artiste), propulsée dans un nouveau lycée, elle s'invente d'abord un rôle de fille populaire, petite amie d'un étudiant, indépendante à la maison... La gentille Justine devient son amie d'élection.

Avril a des démons profonds et elle vole le trousseau de clés de la mère de Justine, femme de ménage dans de belles demeures. En effet, Avril adore s'introduire chez les gens et rentrer dans leur intimité, fouiller leurs affaires avant de les remettre en place. L'activité coupable prend une autre dimension lorsque le beau et bête Raphaël découvre le secret d'Avril et l'oblige à lui ouvrir les portes pour voler des objets précieux. Suite à un drame, Avril fugue, misérable et malheureuse. Elle va découvrir qu'elle n'est pas seule au monde...

Si le roman flirte avec le genre policier et présente des aspects de beau suspense, il est avant tout un roman psychologique fouillé et intelligent. L'héroïne est suivie au présent avec la distance pertinente («elle») du narrateur omniscient. Son mal-être et les symptômes qui en découlent sont frappants et on la prend rapidement en pitié. Comme le dit Tomek (héros de La rivière à l'envers), elle est attachante, touchante. Un beau portrait d'adolescence dans ses extrêmes, servi par l'écriture tout en légèreté de Claire Cantais.

«Il s'en est fallu de peu. En même temps, c'est un peu ce qui est bon aussi. Cette sensation décuplée d'être vivante, comme après un plongeon dans une eau glacée.» (p. 95)