Si mon père était encore là...

« Si mon père était encore là… », titre du récit, rythme chaque épisode de cet album fondé sur l’absence. Il faut attendre l’avant-dernier épisode pour apprendre que cette absence est celle de la mort par cancer du meilleur des pères aux yeux de son fils qui peut-être, ainsi se console. Tout au long d’une journée, au réveil, après le petit-déjeuner, en vacances, à la maison, au magasin, l’enfant s’imagine une vie commune. Il donne de lui-même l’image d’un petit garçon affectueux, remuant. L’inquiétude est diffuse, elle se perçoit dans le vide du bureau, du pique-nique. Il dessine tout autant un portrait de son père, architecte, musicien peu doué (selon maman) ou peintre, père héros de son fils, père modèle du fils qu’il voudrait être. Enfin, ce récit de vie raconte les choix faits, celui de maman qui vit avec Jacques. Entièrement à la première personne, la familiarité des personnages, les épisodes tout à fait quotidiens, les émotions ressenties engendrent l’identification. On se sent proche de cette tristesse retenue.

Ces alternances de vie rêvée, évidemment drôle, et de vie réelle avec la solitude et la peine, impriment à ce récit une tonalité douce-amère. Un chat gris assiste l’enfant dans ces aventures, témoin des chagrins et des bêtises. Il allège le propos tout en redoublant les émotions de son jeune maître. Bleu-gris, orangé, couleurs dominantes, servent d’arrière-plan aux dessins à la plume, rapides, un peu baveux comme des ébauches de ce qui ne sera pas. Le récit d’Yann Walcker et les illustrations de Robin mettent en mots une épreuve vécue par un certain nombre d’enfants. Avec retenue, les auteurs mettent en lumière tout ce qu’on doit à son père, un chant d’amour filial assez rare pour être salué.