La Caravelle d’El Aouina

Moncef, petit Tunisien, adore les avions et rêve de piloter (fictivement, bien sûr) la vieille caravelle reléguée dans un coin d’aéroport. Avec ses amis, il met une nuit son projet à exécution. Mais voilà, les pompiers font en même temps leur exercice annuel d’évacuation ! Face à cet avion envahi de passagers, les adultes soupçonnent que « des instructions ont dû être données, très très très haut. Pour nous éprouver, je le répète ! » (p. 71). Le malentendu dissipé, un gradé de l’aéroport en colère raccompagne Moncef chez lui, et se clame quand il reconnaît son quartier d’origine et ses amis d’enfance ! Tout finit bien.

Ecrit et illustré par Pef, publié une première fois en 1989, ce sympathique petit roman séduira les lecteurs débutants. Il s’agit d’une version « de luxe » : quadrichromie, papier glacé épais. Un bel écrin pour une histoire cocasse dans laquelle Pef, comme toujours, prend le parti des enfants. Les adultes se ridiculisent, empêtrés dans leurs craintes face au pouvoir, oublieux de leurs jeunes années. Les petits Tunisiens font la fête sans vraiment réfléchir à l’illégalité et aux conséquences de leurs actes. Chacun sera remis à sa place. Le responsable de l’aéroport prendra une (brève) leçon de modestie en retournant à El Aouina ; Moncef apprendra à accommoder ses rêves avec la réalité (il devient très prosaïquement maçon, mais continue à regarder les avions du haut de ses chantiers). L’écriture vivante de Pef joue habilement sur l’accumulation (« L’avion lui parlait, s’expliquait, se montrait, se démontait, […] », p. 27) ou la répétition rendant la lecture à la fois humoristique, tonique et simple. Enfin la tendresse affleure lorsque l’on sait que l’auteur, grand amateur d’aviation, a utilisé certains de ses propres souvenirs d’enfance pour créer le personnage de Moncef. A découvrir ou redécouvrir dès 8 ans.