Fugue traversière

« Fuir vers un endroit où je pourrais me sentir vivant, où j'en aurais le droit. N'importe où pourvu que ce soit ailleurs. A des centaines de kilomètres de la tombe de mon frère.  »


Nicolas, le frère de Julien, personnage principal de ce nouveau roman écrit par Jean-Luc Luciani, a perdu la vie, fauché par un conducteur de voiture ivre. Depuis, ses parents se noient dans leur tristesse. Or, un matin, le père de Julien ne trouve plus la force de se lever pour aller déposer son fils au collège. L'adolescent décide donc d'agir. Fuguer équivaut dès lors pour lui à hurler à ses parents que malgré sa tristesse et sa douleur, il est bien vivant. Il prend donc un train pour Marseille. A son arrivée, il se fait houspiller par une bande de racketteurs intrigués par l'étui de sa flûte traversière. Abdallah un jeune SDF vient en aide à Julien, repousse les racketteurs et prend sous son aile le jeune homme. Il lui explique les règles de (sur)vie lorsqu'on est sans domicile fixe, sans papiers et squatteur. Il lui apprend aussi comment mendier. Abdallah apporte à l'adolescent l'attention et la protection d'un grand frère. Les talents de musicien de Julien rendent le quotidien plus supportable financièrement parlant, jusqu'au jour où Medhi, le chef de bande des racketteurs, dérobe à Julien son instrument. Rien de va plus pour le jeune homme…


C'est la sonate d'un adolescent à la recherche de lui-même que Jean-Luc Luciani exécute par ce roman. La fugue rend en effet Julien foncièrement vivant dans la mesure où elle le confronte à de nombreuses inconnues : la rue, la solitude, et l'amitié ! Dans cette narration à la première personne qui favorise l'identification avec le personnage principal, le lecteur, se calquant sur le devenir de Julien, oscille entre petites joies, doutes et espoir. L'écriture sensible mais sobre de l'auteur dépeint très justement les états d'âme du héros, sa douleur face au décès de son frère et au désarroi de ses parents, mais également son envie de vivre malgré tout. « La vie doit continuer. La vie va continuer. » La fugue ou l'art de fuir pour mieux se retrouver…