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Date de publication
Age-cible

Antigone 256

Roman
à partir de 13 ans
: 2012012035
12.00
euros

L'avis de Ricochet

Les mythes sont tous éternels, mais certains sont plus fascinants que d’autres. Antigone en fait partie, pour preuve l’extraordinaire lignée d’écrivains qui se sont penchés sur sa vie dramatique, depuis Eschyle et Sophocle jusqu’à Brecht, Anouilh ou Cocteau. Audacieusement mais avec modestie (remerciements introductifs et bibliographie finale), Jacques Cassabois propose sa version.
L’histoire est connue : A la mort du roi Œdipe, dont Antigone était la fille préférée, la ville de Thèbes est l’enjeu d’une guerre. Les deux frères héritiers s’entretuent, et Créon, beau-frère d’Œdipe, décide l’enterrement de l’un mais pas de l’autre. Antigone passe outre l’ordre et procède en cachette aux rituels funéraires sur la dépouille de son frère. Découverte, elle est emmurée vivante par Créon, offerte au dieu des enfers dans un simulacre de mariage. Son fiancé la délivre, mais trop tard : elle s’est donné la mort.
Il s’agit ici non pas de théâtre mais d’un roman, servi par un narrateur externe qui procède à un récit objectif des faits. Des intermèdes en italique, sortes de chœurs antiques, ponctuent de leurs commentaires le déroulement de l’action. La langue est moderne, simple et par moments vivante (voir les conversations des gardes), allant jusqu’à l’anachronisme (« rodomontades », p. 23) mais n’oubliant jamais non plus la dignité inhérente au sujet, avec quelques longues et belles phrases tragiques, l’emploi de termes tels que « race » pour famille, et l’usage d’un présent qui se veut souvent intemporel. Les épithètes homériques sont également nombreuses : Actor le taciturne, Hémon le doux… L’histoire est fidèle, on n’y sent pas de message sous-jacent comme un Brecht a pu le vouloir. Les thèmes de la faute, de la filiation (Antigone croit devoir expier le crime de son père) et du destin, le rapport aux dieux sont habilement mis en résonance les uns avec les autres. Car la psychologie d’Antigone 256 est très aboutie ; l’héroïne est particulièrement nuancée mais aussi les personnages qui l’entourent, de la sœur aimante quoique frileuse à Créon piégé dans ses convictions, et jusqu’aux gardes hésitants. Evidemment, Antigone symbolise la pureté absolue, le respect d’un idéal écrasant, avec ce que cela comporte de dureté voire de méchanceté. Comparée à plusieurs reprises à un cristal, elle dégage parfois une aura surnaturelle qui effraie : « Le jour s’est enfin levé, offrant son premier éclat de lumière à Antigone. Le soleil l’a parée comme une reine. Ismène la contemple. Elle est méconnaissable, presque fragile dans son péplos de laine blanche. Un éclat de cristal, hanté par la dureté du marbre. » (p. 53). Volontiers didactique, Antigone 256 n’hésite pas à proposer avec des notes de bas de page ou dans le corps du texte des résumés explicites de la situation, à poser des personnages même absents (Œdipe…), le contexte social et culturel de l’époque (par exemple le système de gouvernance des cités). Jacques Cassabois a su s’approprier une histoire plus que forte, lui donnant un ton original mais sans excès, et il offre ainsi au lecteur une introduction au mythe d’Antigone plus qu’honorable.

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