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Jacques Cassabois

30 avril 2010

Jacques Cassabois est né en 1947 dans le Jura. Après avoir suivi les cours de l'école du Théâtre National de Strasbourg, il devient instituteur, puis animateur à la Fédération des Œuvres Laïques de Seine-et-Marne. C'est là qu'il découvre la littérature pour la jeunesse. En 1978, il écrit "Le premier chant" qui sera publié en 1983, par les éditions Ipomée et illustré par Frédéric Clément. Il travaille ensuite au CDDP et anime pendant 15 ans de très nombreux ateliers d'écriture avec les enfants. Auteur à temps plein depuis 2002, Jacques Cassabois s'intéresse aux textes anciens et fondateurs, aux mythes et aux contes qu'il s'attache à « augmenter » avec justesse. Il est l'auteur d'une cinquantaine d'ouvrages (des contes, des albums, des romans) Citons « Le joueur de flûte de Hamelin", "Sindbad le marin"," L'épopée de Gilgamesh", "Tristan et Iseut", "Antigone" et prochainement Jeanne d'Arc. Sans plus attendre, accueillons Jacques Cassabois, auteur opiniâtre et exigeant, et… « fourmi » dans l’âme.


- A quel héros et/ou personnage de fiction vous identifierez-vous volontiers ?

« Je ne suis pas un héros ! » chantait Daniel Balavoine. Je pourrais le chanter aussi. Ce m’est donc un peu compliqué d’en trouver un auquel m’identifier. Et puis vous savez, le héros est un concept grec qui renvoie à la notion de demi-Dieu. C’est bien vertigineux pour moi. Je me soucie d’être d’abord un homme.

- Quelle utopie seriez-vous prêt(e) à défendre ?

Le problème avec les utopies, c’est qu’elles sont tôt ou tard confisquées par les idéologies et qu’on se réveille toujours un matin avec la gueule de bois, croyant avoir œuvré sincèrement à la propagation d’une idée, en n’ayant rien fait d’autre qu’assurer le pouvoir et les privilèges de ceux qui s’en sont institués les garants.

Tout bien considéré, les seules utopies recevables sont les utopies personnelles, intérieures, qui n’exigent rien d’autre que nos propres efforts pour se réaliser. L’utopie proposée par les mystères d’Éleusis reste toujours sur le chantier : l’homme comme clé de compréhension de l’univers et son corollaire, pour changer le monde, changeons le cœur de l’homme. Comme chacun porte une part de responsabilité, nous avons tous largement de quoi nous occuper durablement et à peu de frais. Nul besoin d’appareils ni d’apparatchiks. Nul besoin non plus de ces conférences internationales qui vous claquent en quelques jours de quoi nourrir tous les faméliques de la planète.

- En dehors de votre approche d'auteur pour enfants, que rêveriez-vous d'être ?

Je devais vraiment être auteur de livres pour la jeunesse. Cela n’a jamais été un rêve, mais une réalité qui s’est imposée à moi, au fil du temps et dont j’ai vraiment pris conscience il y a quelques années. J’ai d’ailleurs écrit un livre qui décrit, à travers trente ans d’engagement, comment ce processus est entré dans les faits. Ce livre s’intitule L’ART DE L’ENFANCE. Faute d’avoir pu y intéresser un éditeur, il se trouve intégralement sur mon site internet


Je ne rêve pas d’être quelqu’un d’autre. Ce rêve-là fait le lit de la complaisance ou des regrets. Je pense que chaque individu vient au monde avec une tâche d’évolution particulière à accomplir. Je ne rêve donc que de tendre le plus possible vers ce que je dois être.

- Où écrivez-vous ? Quel est le lieu qui vous inspire le plus ?

J’écris dans mon bureau. J’y entre tous les matins autour de quatre heures, régulièrement. La régularité m’est nécessaire et elle favorise ma concentration. Je suis un lent. J’ai besoin de travailler beaucoup et tous les jours.

L’inspiration, cet instant privilégié de clairvoyance où, en une fraction de seconde, ce qui vous tenait en échec la veille vous apparaît soudain, illuminé, à votre portée, survient rarement dans mon bureau mais dans mon lit, dans l’instant de clarté qui suit le sommeil de la nuit, ou pendant les insomnies. Ce sont des instants denses et fugaces. Le moindre geste les disperse. Mon impatience à les retenir les a souvent gaspillés et je me suis organisé pour ne plus les perdre. J’ai toujours de quoi écrire sur ma table de nuit. Quand ils surviennent, je note à tâtons, sans allumer la lampe (pour ne pas réveiller ma femme) et en fermant les yeux (pour ne pas me réveiller), quelques mots clé qui me permettent, une fois levé, de reconstituer les détails de ma vision. Ensuite, savoir si ce que j’en tire s’intégrera dans mon récit en cours, c’est une autre question.

- Quel est le sentiment qui vous habite le plus souvent ?

Le sentiment que je n’ai pas encore vraiment commencé.

Un jour que je discutais avec Claude Duneton, il me confia qu’après avoir écrit son livre RIRE D’HOMME ENTRE DEUX PLUIES, il s’était senti en paix. « J’avais l’impression, ajouta-t-il, d’avoir écrit LE bouquin que je devais écrire. Tu comprends ? »

Je comprenais très bien, mais je n’ai jamais éprouvé une telle impression. J’espère toujours y parvenir.

- Que redoutiez-vous enfant ?

D’être séparé de ma mère.

- Vous arrive-t-il de côtoyer des êtres imaginaires ?

Bien-sûr ; les personnages de mes livres. Je ne peux pas les faire vivre sans les intérioriser.

- Que feriez-vous ou diriez-vous à un ogre s'il vous arrivait d'en croiser un ?

Dégage de ma route, gros lard !

- Qu'avez-vous conservé de l'enfance ?

Un double exigeant, qui m’incite à le suivre, à remettre sur le métier quand j’écris. Je l’ai rencontré de loin en loin, au cours de ma vie. La première fois vers quatre ans. J’ai fini par le cerner en écrivant L’ART DE L’ENFANCE où je lui consacre un chapitre. Je l’appelle L’ENFANT ABSOLU.

- Selon vous, qu'est-ce qui fait vendre un livre ?

Vendre ? Qu’entend-on par vendre, exactement ? Vendre façon best-seller ? À partir de quel chiffre considère-t-on que l’on vend ? N’écrit-on, ne publie-t-on (parce que la vente concerne aussi l’éditeur) que pour vendre ?

La vente est aussi une question de positionnement commercial, de stratégie marketing. Elle fait l’objet de décisions. Je ne vais pas en parler, ce n’est pas mon métier. Je vais m’en tenir à la part de l’auteur.

Pour vendre, il faut plaire aux lecteurs n’est-ce pas, et on a quelques idées là-dessus, évidemment. En gros, tout ce qui permet de provoquer l’identification : âge du héros, situations vécues, imaginaire proche de celui du lecteur, registre de langue, thématiques dans l’air du temps…

Oui, ça doit aider ! Sauf qu’on a parfois envie de tirer la langue à ces critères et sauf que tous les livres qui les respectent ne se vendent pas de la même manière. Donc, ces paramètres n’expliquent pas tout. Pourquoi un livre sort-il du lot, alors ? Je vois deux raisons.

La première parce qu’il y a une sorte d’équilibre qui s’établit entre d’une part une demande ou plutôt une attente (certains éditeurs ont un nez pour la capter) et une offre qui vient au moment opportun la satisfaire. Une synchronicité parfaite (qui n’est pas forcément instantanée. Certains livres peuvent mettre des mois, voire des années à s’imposer), dont les lois restent à découvrir.

La seconde, parce que l’auteur du livre mérite ce qui lui arrive.


Cela dit, le désir d’écrire d’un auteur est complexe et je ne suis pas certain que les perspectives de vente y tiennent une si grande place, en tout cas chez ceux que je connais, même si aucun d’entre eux ne fait la grimace quand un de ses livres réussit.

Personnellement, ce n’est pas l’espoir de décrocher un hypothétique jack pot qui m’anime quand je commence un nouveau livre, mais l’envie de relever un défi, de réussir enfin à écrire le livre qui me tient en échec depuis toujours, pour trouver l’apaisement de Claude qui éclatait dans son RIRE D’HOMME. Et j’ai vite fait d’oublier les fameux critères qui sont censés faire vendre. C’est une course qui s’engage entre L’enfant absolu et moi qui peine à le suivre. J’écris pour rester dans sa trace, pour ne pas me laisser distancer. L’écriture devient alors mon chemin de vie et le véhicule qui me permet d’avancer.

À la longue, j’ai fini par remarquer qu’elle m’offrait au quotidien, tant dans mon travail solitaire que dans la confrontation de ce travail avec les autres, une pluralité de situations parfaitement adaptées à la transformation personnelle dont je parlais plus haut et que je dois à accomplir.

Bien sûr, quand en plus mes livres se vendent, je gagne ma vie et je suis extrêmement satisfait.

- Quel qualificatif vous colle à la peau ?

Inclassable. Et comme vous dites, ça colle !




- Quelle est la meilleure phrase qu'un enfant vous ait dite ?

C’était un dimanche. Je signais des livres dans un petit village voisin du mien. Une fillette qui venait d’entrer en sixième. Elle s’appelait Camille. Elle avait lu mon TRISTAN ET ISEUT quelques mois plus tôt, quand elle était encore au cm2. Qu’elle ait avalé les six cents pages du livre, je n’en revenais pas. Devant mon étonnement, elle me dit : « J’ai mis une semaine. J’aurais pu mettre moins. Mais parfois (et là, elle plaça ses mains en coupe devant elle, comme on recueille l’eau d’une source pour se désaltérer), c’était tellement vibrant que je refermais le livre pour ne pas aller trop vite, mais je le rouvrais tout de même, parce que je voulais savoir la suite. »

Tellement vibrant ! En arrivant à la maison, j’ai aussitôt partagé cette rencontre avec ma femme. Le lendemain, je la racontais à mon éditrice.

Me revenait à l’esprit certaine note de lecture paresseuse qui m’avait blessé, d’une critique qui se demandait si cette « plus belle passion de tous les temps » allait beaucoup intéresser les ados, sur le petit air grinçant de « On sait bien ce que veulent les jeunes lecteurs. Obtempérez donc, messieurs les auteurs. Efforcez-vous de satisfaire leurs attentes ! » Plus démissionnaire, tu meurs ! Un tel conformisme m’avait mis en rogne.

Merci Camille, tu m’as rassuré. Je ne t’oublierai jamais.


"Je ne cherche à les aider à grandir, à réfléchir, à les convertir à la pertinence, à la profondeur, que sais-je...à les changer en citoyens pendant qu'on y est, ni en aucun de ces mutants qui encombrent les professions de foi des politiques culturelles. Qui suis-je pour m'en supposer apte ? Qui suis-je pour m'instituer porteur de culture ? Je ne me sens investi d'aucune mission condescendante. Je m'efforce juste de parler avec l'espoir que quelques uns entendront afin qu'ils s'approprient mes paroles si elles leur conviennent, et j'évite de penser aux obstacles, qui les séparent de moi, pour ne pas baisser les bras"

Extrait de l'Art de l'enfance, Chapitre 13 "Littérature pour", pp 20-21.



- Quelle est votre définition du bonheur ?

Les définitions ne sont pas trop mon truc. Je sais, ça fait toujours brillant et cultivé, d’en glisser une dans la conversation. Mais, désolé, je n’ai pas ça en magasin.

- Si vous aviez la possibilité de recommencer, que changeriez-vous ?

Pour l’instant, rien ! Mais je sais que je n’aurai pas épuisé ma cuirasse d’insuffisances humaines dans cette vie. Alors, sans doute, je devrai me remettre à la tâche. Sur quoi ? C’est un peu tôt pour le dire. Tout n’est pas joué. Il faut d’abord que j’en finisse, que je termine ce voyage au bout de la vie, au bout de la nuit. Mon dernier souffle peut encore tout transformer, puisque, dit-on, les derniers seront les premiers.

Quand j’aurai rendu l’âme, comme un élève studieux sa copie, je pourrai faire le point dans la lumière crue de la vérité. Les examinateurs ne sont pas complaisants et je ferai partie du jury. Alors, une fois mon dernier ouvrage passé au crible, une fois le bilan dressé des pertes et des profits cumulés depuis ma première aube, j’endosserai à nouveau la tunique de peau du vieil Adam, nanti d’une nouvelle feuille de route, pour une nouvelle tentative et je renaitrai, porté par le souffle des étoiles. C’est alors que j’aurai la possibilité de tout recommencer.

- Enfant, quel genre de lecteur étiez-vous ?

J’ai appris à lire tout seul à cinq ans, en écoutant déchiffrer les grands du CP, depuis mon banc de section enfantine, ce qui me laisse à penser que les mots écrits devaient me paraître familiers pour m’attirer ainsi.

Mais je n’étais pas vraiment un « genre » de lecteur. Nous n’avions pas assez de livres pour cela et je lisais ce qui se présentait. Un ami de mes parents m’avait abonné au journal Bayard. Il sortait le jeudi (jour de congé, naguère). À côté de ce journal, mes lectures avaient deux sources principales d’approvisionnement. Le maître d’école, qui nous prêtait épisodiquement des livres de bibliothèque, le samedi après-midi à la fin de la classe et le curé du village qui distribuait ses albums de Tintin, le jeudi soir, après le patronage.

- Vis-à-vis de quoi vous sentez-vous impuissant ?

La mauvaise foi. Et plus les années passent, plus elle s’accumule, je trouve, et plus j’ai du mal.

- Quel est l'animal auquel vous ressemblez le plus ? Pourquoi ?

La fourmi. Pas la reine de la colonie, évidemment, ni un soldat. Une ouvrière. Parce qu’elle est petite, opiniâtre, qu’elle travaille beaucoup et que son ouvrage, pour infinitésimal qu’il soit, contribue à la cohésion de la collectivité.

- Quel est le mot que vous préférez dans la langue française ?

Le mot bienveillance. Je l’ai rencontré incarné, une fois dans ma vie. Il s’appelait Jean Bottéro.

- Que souhaiteriez-vous que l'on retienne de vous ?

« Quel acte avons-nous accompli qui puisse nous survivre un seul jour ? »

Cette phrase est la dernière de mon recueil DIX CONTES DE FANTÔMES. A trop considérer l’avenir, on risque de ne pas voir la pierre devant nos pieds, qui va nous faire tomber.



"Littérature pour la jeunesse. J’ai commencé à aimer cette préposition, avec ses limites, et même à cause des contraintes supplémentaires qu’elle impose. Ce sont bien des enfants qui se bousculent en moi, quand je travaille à semer pour eux, dans mes histoires, des poignées de références à la vie. Leur présence est lourde, encombrante. Elle pèse à la base de mon cerveau, qui abrite mon vaisseau mémoire à remonter les siècles."

Extrait de l'Art de l'enfance, Chapitre 13, "Littérature pour"



Vos livres
- Quelle est votre dernière sortie pour la jeunesse ?

DIX CONTES DE FANTÔMES, en Livre de poche jeunesse, en février, puis la reprise en avril, de TRISTAN ET ISEUT, toujours en livre de poche.

- Le(s) livre(s) dans votre production dont vous êtes particulièrement fier ou qui vous laisse(nt) un

souvenir particulier


Je suis content d’avoir pu écrire Sindbad, Gilgamesh, Tristan et Iseut, Antigone, Jeanne d’Arc.




- Quel est le thème que vous aimez davantage traiter ?

J’aime raconter la vie de personnages qui affrontent leurs limites et qui assument totalement une destinée qui fait d’eux des modèles universels.




- D'où est né votre premier livre/ illustration ?

Oh là, les causes et les conséquences… quelle est la vraie cause ? La première ? On remonte très haut avec des questions pareilles. J’ai développé tout cela dans L’ART DE L’ENFANCE, mais je vais résumer. Mon premier livre, qui n’a pas été le premier publié, s’intitule LE PREMIER CHANT. Il a été édité par les éditions Ipomée en 1983, avec des illustrations de Frédéric Clément.

Avant de pouvoir l’écrire, deux conditions devaient être réunies. La première, que mon envie d’écrire se remette à flamber. La seconde, que je sache dans quelle direction me diriger. La naissance de mon fils s’est chargée de la première. La découverte de certains livres, dans un contexte donné, de la seconde. Cela se passait à la fin des années soixante-dix. Les livres étaient ceux des auteurs de l’époque : les Grimaud, Grenier, Pelot, William Camus, Coué, les Held… et les albums de François Ruy-Vidal. J’étais alors permanent de la Fédération des Œuvres Laïques de Seine-et-Marne, et le contexte militant d’alors où j’étais engagé portait haut la lecture. Il a notamment permis, grâce à l’arrivée de la gauche au pouvoir, de créer des bibliothèques dans les écoles et de former les enseignants à la littérature pour la jeunesse.

- Quel livre en littérature de jeunesse auriez-vous voulu écrire ou réaliser à la place d'un autre ?

J’aurais bien aimé récrire l’Odyssée. Charlotte Ruffault me l’avait proposé, mais au cas où Martine Laffon qui avait été pressentie en premier, n’était pas intéressée. Or, Martine Laffon a accepté.




- Vous avez travaillé autour des contes traditionnels, de la mythologie et des grands mythes (Le joueur de flûte d'Hamelin, Sindbad le marin, L'épopée de Gilgamesh, Tristan et Iseult, Antigone). Qu'est-ce qui vous attire dans le choix de ces textes fondateurs ou du patrimoine ?

Est-ce leur héritage, leur richesse, leur universalité, leur modernité aussi parfois ?


Rien de tout cela. Ce n’est pas l’idée a priori de ce que j’allais tirer de ces textes qui m’a décidé à les récrire. Ce sont les circonstances qui m’ont amené à eux, ou plutôt qui m’ont amené au premier d’entre eux, Sindbad, car ils se sont présentés l’un après l’autre. J’ajoute que, dans la plupart des cas, le choix ne vient pas de moi. J’ai toujours répondu à une offre de mon éditeur, sauf pour Sindbad qui a tout déclenché.

J’avais proposé ce projet en 1992, à Laurence Decréau qui se trouvait alors chez Hachette. Elle l’a accepté, car il entrait dans une déclinaison de la bibliothèque verte qu’elle s’apprêtait à développer. J’ai donc abordé Sindbad comme un roman d’aventures, pour me rendre compte rapidement qu’il cachait bien son jeu. À force de lire et de relire, de chercher à comprendre ce qui m’intriguait (pourquoi le nom d’Hindbad est-il si proche de celui de Sindbad ? – Bettelheim préfère les présenter comme deux aspects distincts d’un même individu en les dénommant Sindbad le marin et Sindbad le porteur – Pourquoi Sindbad lui donne-t-il de l’argent pour l’inciter à revenir l’écouter ? Que signifient les îles où Sindbad échoue, et pourquoi y en a-t-il deux à chaque périple ? A quoi servent vraiment les naufrages ? Pourquoi Sindbad affronte-t-il des épreuves dans tous ses voyages sauf dans le premier ? Et le vieillard de la mer dont Sindbad se débarrasse en l’assassinant, meurtre qui le mène tout droit en paradis au voyage suivant ?... ) je me suis rendu compte que cette mer où naviguait le héros n’était ni plus ni moins que l’océan de sa vie et que ses aventures nous révélaient par le menu son propre accomplissement humain, depuis sa renaissance à lui-même, très précisément racontée, jusqu’à son accès à la sagesse à la fin du septième voyage.

Autrement dit, ce conte nous expose comment Sindbad gravit les sept degrés de son échelle de Jacob.




Cette évidence ne s’est pas imposée à moi brutalement, mais peu à peu, au cours du travail, à mesure que je répondais aux énigmes dissimulées dans le texte (la traduction de Galland), jusqu’à l’apothéose du fabuleux dernier voyage où Sindbad est réduit en esclavage.

En revanche, la certitude que Sindbad nous narrait son évolution s’est imposée assez vite et m’a permis de choisir le temps de mon récit. Je voulais accompagner la maturation de Sindbad par la syntaxe. C’est pourquoi le premier chapitre, qui décrit l’homme ancien, est écrit au passé et le dernier où l’homme neuf se révèle dans sa métamorphose accomplie est entièrement au présent, le temps des sages qui ont aboli la durée (le ressassement du passé ainsi que les perspectives qui nous font espérer du futur). Entre début et fin, le présent grignote peu à peu le passé, à mesure que la transformation gagne du terrain.


(Pour rester dans le cadre de ce questionnaire, je ne m’attarderai pas davantage sur Sindbad. J’en ai plus longuement parlé au chapitre 18 de mon livre L’ART DE L’ENFANCE, dans le cadre d’une rencontre avec des élèves de cm2. Ceux de vos lecteurs qui s’y intéressent pourront en prendre connaissance en consultant mon site.)




- Parleriez-vous d'adaptation ou d'écriture ? Pourriez-vous nous détailler votre approche pour "Gilgamesh" et "Tristan et Iseult" ?


J’avais beaucoup aimé récrire Sindbad. Découvrir une forêt de symboles cachée sous le terreau de la narration et me rendre compte que je n’élucubrais pas, qu’une profonde logique assemblait tous ces symboles pour les unir en un sens incontestable, m’avait émerveillé. J’avais littéralement recréé cette vieille histoire. J’avais mené une enquête, fait parler les indices semés par le conte que j’avais enrichi de ma réflexion, de mes déductions, de ma sensibilité, de ma propre quête humaine à laquelle me renvoyait celle de Sindbad. J’en étais bel et bien l’AUTEUR. J’écris ce mot en lettres majuscules. Auteur, qui puise sa vérité dans son étymologie, le verbe latin augere : augmenter, et non pas le simple adaptateur, qui tripatouille un texte, le redécoupe à sa guise, l’ampute de ce qui le dérange, estimant que : « Ça coco, tu laisses tomber, les jeunes ne vont rien capter. Mais ça coco, au contraire, tu fonces, ça va marcher ! »


Pour se revendiquer l’auteur d’un texte ancien, il faut commencer par plonger au cœur de la vieille œuvre, s’en approcher avec respect en espérant entrevoir son reflet dans le miroir qu’elle vous tend, ensuite se reconnaître intimement dans la quête de ses personnages, sentir trembler son âme de cette parenté, enfin battre le rappel de ses amours, de ses désespoirs, de ses échecs, de ses enthousiasmes, de ses colères, et se confier à cette voix qui vous hèle, qui vous hale vers elle, s’ajuster à sa tessiture profonde, entamer un duo avec elle, pour se rendre compte bientôt que vous chantez en soliste au milieu des nuées.


Voilà ma façon de pratiquer.

Voilà pourquoi je me revendique pleinement l’auteur de tous les grands textes que j’ai récrits et non leur simple adaptateur. J’ai récemment répondu sur ce point, sur le site du Livre de poche jeunesse ainsi que dans le chapitre 21 de L’ART DE L’ENFANCE, où je développe en détail la problématique de la récriture des textes fondateurs.


Je n’avais qu’une envie en achevant Sindbad : recommencer, gratter un autre texte comme un palimpseste, en exhumer le sens et le hisser vers la lumière. Je m’en suis ouvert à Laurence Decréau. — Je n’ai pas d’idée, mais si vous en avez une, je suis preneur.

Deux semaines après, elle me téléphonait :

— Gilgamesh, ça vous dit ?

— Pourquoi pas.

Je ne connaissais pas Gilgamesh. Je l’avais vaguement rencontré grâce à une très courte version de sa légende, dans un recueil d’Henri Gougaud. Je savais que c’était très vieux et c’est à peu près tout. Je me suis donc mis au travail. J’ignorais alors que commençait un intense compagnonnage à rebondissements, qui allait durer dix ans.


En ce qui concerne mon approche de Gilgamesh et de Tristan et Iseut, et pour continuer de répondre à votre question, elle suit un cheminement qui n’a fait que se confirmer au fur et à mesure de mes différents travaux.

Au commencement, je ne sais rien, et j’étais aussi vierge devant Tristan et Iseut que devant Gilgamesh. Je commence à zéro. Je lis les différentes sources disponibles, je prends des notes, j’écris mes questions, réagissant aux chapitres qui me touchent d’emblée ou m’attirent, cochant les passages incompréhensibles, ceux où je pressens une symbolique complexe, cachée sous un épisode en apparence naïf ou fantasmagorique, que je devrai fouiller. Puis, je dresse un premier plan de l’ensemble pour mieux apercevoir l’architecture.

Ensuite, je me plonge dans la bibliographie que j’ai constituée au fil de ma lecture. Œuvres de spécialistes, assyriologues ou médiévistes pour les deux titres évoqués. Sans eux, je ne peux rien. Ils me nourrissent, m’initient à travers leurs références à une civilisation qu’ils connaissent parfaitement, des textes qu’ils possèdent à fond, et, peu à peu, se dégage une vision plus claire à la fois de l’œuvre qui m’occupe et du contexte dans lequel elle a été écrite. Grâce à leur réflexion, j’éclaircis certains passages obscurs, je perçois des significations jusqu’alors inaccessibles qui font écho à mes valeurs de vie, auxquels je substitue d’autres interprétations, les miennes. Je peux alors entamer un dialogue, non pas à égalité avec les érudits, mais en toute légitimité. J’insiste sur ce mot. La légitimité m’obsède. Je suis un candide qui s’aventure dans le jardin des savants et c’est l’écriture, par laquelle j’apporte au vieux récit densité et épaisseur humaine qui m’installe dans la paix relative de la légitimité.

Cette dernière étape de mon processus de travail, l’écriture, est l’instant de la synthèse. Une sorte de dénouement. Toutes les questions qui restent pendantes ou dont les réponses sont intellectuelles, abstraites, se dénouent dans et par la langue. C’est dans ce bain qu’elles se fondent, s’humanisent, deviennent plausibles. Ce n’est pas avec de l’abstraction que l’on émeut un lecteur. C’est avec de la palpitation.

L’écriture est donc ce moment étrange où la vie sourd de l’informé, de l’informulé, s’impose et prend comme un mortier.


Un dernier détail encore à vous signaler : si je m’immerge dans les différentes sources d’une œuvre et dans les études des savants, je m’interdis d’approcher les tentatives d’auteurs (ou de cinéastes) qui m’ont précédé. Pour deux raisons. Je n’oublierais pas ce qu’ils ont fait et je ne pourrais pas m’en libérer. J’aurais donc l’impression de les piller. Mais surtout leur œuvre achevée me découragerait, moi qui suis à l’attaque de la mienne. Lorsque j’écris, je ne suis pas comme un consommateur dans un supermarché, qui hésite entre différentes marques d’un produit, pour choisir celui qui lui convient le mieux. Je n’ai pas de vision a priori de ma version. Elle se dégage peu à peu de mes efforts de réflexion et de mon travail. Aussi, partant de rien, je préfère avancer sans modèle.


Je me bornerai à ces quelques informations, dans le cadre de notre entretien. Les personnes qui voudraient en savoir davantage à propos de Gilgamesh et de Tristan et Iseut , pourront trouver de quoi satisfaire autrement leur curiosité en consultant mon site.

- Sur quel projet travaillez-vous actuellement ?

En ce moment, fin avril 2010, alors que je réponds à votre questionnaire, je viens de terminer la création de mon site internet (c’est du boulot), à laquelle je me suis attelé immédiatement après avoir terminé mon roman sur Jeanne d’Arc (un engagement que j’avais pris devant ma femme. Ça rigole pas !). Le livre sortira en août prochain (c’est aussi du boulot). Je n’ai pas encore de nouveau projet et je laisse retomber la furie pour le laisser venir à moi.

- A propos de Jeanne d'Arc. Peu d'ouvrages pour la jeunesse semblent s'intéresser à cette figure emblématique de l'Histoire de France. Pourquoi ? Son itinéraire peut-il nous interroger aujourd'hui ?

Je pense que le personnage de Jeanne d’Arc pose problème à ceux qui la connaissent mal et je suppose à cela deux raisons principales.

D’abord l’énigme des voix ! Dans notre époque athée et scientifique, s’aventurer dans le domaine de Dieu, qui plus est par la face nord de la mystique, vous fait vite passer pour un gogo superstitieux. De plus, comme cette couleuvre d’inspiration divine est difficile à avaler par nos raisons raisonneuses, l’histoire de cette fille de cul terreux qui a botté les fesses aux Anglais, sent forcément son embrouille à plein nez ! Genre canular monté de toutes pièces par les puissants et entretenu pour abuser le bon peuple, le souder autour d’une idée de la nation, de la défense de la patrie, bref le transformer plus facilement en chair à canon, etc. Halte là ! Prévenus de tout comme nous le sommes, nous autres, faut pas nous la faire !

Seconde raison, qui découle de la première : le bruit entretenu aujourd’hui autour de Jeanne par certains de ses partisans, venus de l’extrême droite.

Comme nous avons la mémoire courte, la Pucelle se retrouve ainsi propulsée, pour la plupart de nos concitoyens, au rang de soutien actif du Front National – un comble ! –, grâce au raid que ce parti a lancé sur son héritage (institution d’une fête de Jeanne d’Arc le 1er mai ; manière de bras d’honneur au 1er mai syndical et habile amalgame avec la commémoration orléanaise du 8).


Je dois à la vérité de rappeler qu’avant l’OPA lancée par M. Le Pen sur Jeanne, les communistes à la Libération avaient convoqué l’héroïsme de la Pucelle pour exalter celui de leur grande résistante Danièle Casanova. Lors du conflit précédent, celui de 14-18, Jeanne avait été invoquée comme gardienne de la France. Les allégories qui la présentent encourageant les poilus dans les tranchées et conduisant la France à l’assaut de l’Allemand, come elle avait fait jadis face à l’Anglais, ne manquent pas. Cette image était acceptée sans réticences majeures, toutes tendances politiques et philosophiques confondues. Quant au XIXè siècle, c’est là que l’idée nationaliste a pris corps, à travers la lutte politique qui opposait les républicains et les catholiques. Michelet a commencé à en faire une sorte de sainte laïque, mais l’Église a eu le dernier mot en la canonisant en 1920 (le processus avait été lancé en 1869).

Toutes ces péripéties ne sont que des gloses développées par des personnes qui n’avaient d’autre but que de faire sponsoriser leurs idées par une héroïne représentative. Certes, les temps ont changé. Pour utiliser une autorité équivalente, aujourd’hui, on recourrait aux services d’un footballeur. Mais quoi qu’il en soit des annexions et des récupérations, la vie réelle de Jeanne est d’une toute autre trempe et ce bref rappel n’est destiné qu’à relativiser l’arrogance de propriétaire affichée par le Front National, même si, hélas, nous avons souvent tendance à ne nous souvenir que du dernier qui a parlé.


J’ai pris conscience de ces réticences, que dis-je réticences, de ce parfum délétère qui empoisonnait le souvenir de Jeanne, à la fin de mon travail. Je venais de passer neuf mois éblouissants en sa compagnie. Cela m’a révolté.

Quand Cécile Térouanne, chez Hachette, m’a proposé ce sujet, je n’en savais pas beaucoup plus de Jeanne que je n’en savais au départ de Gilgamesh, mais ce qui m’avait attiré d’emblée, c’était justement le mystère de ses voix, ainsi que son mysticisme guerrier. J’avais envie de me faire une idée en examinant sa vie de près, avec l’aide des historiens, des érudits piocheurs d’archives et de manuscrits, sans me préoccuper des clameurs des récupérateurs contemporains ni des imprécations de leurs adversaires. Jeanne toute entière. Jeanne et son siècle. Charles VII et ses conseillers qui vidaient les caisses du royaume, La Hire, Alençon, le Bâtard d’Orléans, Jeanne et les Anglais, Bedford, Talbot, Henri VI, les Bourguignons. Jeanne et ses tortionnaires. Jeanne et ses parents, Jeanne et ses saintes, et le peuple, et la guerre, et les hommes, l’odeur de la poudre et du sang et les nuits sur la paille des bivouacs.

J’ai découvert un personnage épique. Une amoureuse à l’égal de Tristan, du même amour absolu, mais de Dieu, tendue vers un inaccessible qui la poussait à se surpasser, lui donnait un abattage de géante. La même détermination qu’Antigone, résolue et inflexible, capable d’aller jusqu’au sacrifice de sa vie, par fidélité à l’idée qui la conduisait. Pathétique comme Gilgamesh devant l’infranchissable obstacle de sa destinée totalement assumée, le même désarroi que lui devant l’obligation d’accepter l’inéluctable.

Jeanne m’a fait retrouver ces grands êtres que j’avais côtoyés au cours de ces quinze dernières années. Elle en était une sorte de récapitulation, avec cette particularité qu’elle avait été, seule de ma galerie de compagnons, un être de chair et de sang et qu’elle avait contribué à façonner notre pays.


Alors, franchement, si avec toutes ces qualités, tous ces enjeux, toute cette incitation vigoureuse à tracer notre route dans la sincérité et l’enthousiasme, sans nous soucier des attentistes et des cyniques, si malgré cette exhortation à vivre pleinement qu’elle nous adresse par delà les siècles, il n’y a pas matière aujourd’hui à intéresser des jeunes, c’est qu’on est vraiment mal barrés, mes amis !


D’autres détails, que je n’ai volontairement pas repris ici, sur certains aspects de l’actualité de Jeanne et sur les recherches du XIXè siècle qui ont permis de la redécouvrir sont à la disposition des personnes intéressées sur mon site.

- Où et comment vous voyez-vous dans 10 ans ?

Je ne me vois pas et je ne cherche même pas à me voir. J’aurai bientôt 63 ans et j’ai l’impression que mon compteur est resté bloqué du côté de 40. Je n’ai aucun avenir. Je n’ai que du présent. Pas ce présent néo-hédoniste, mâtiné de zénitude occidentale, que les cigales d’aujourd’hui entonnent compulsivement sur l’air de « Adélaïde, après nous le déluge ! ». Non, un présent de travail soutenu auquel je suis attentif parce que je sais qu’il m’offre, particulièrement quand il m’est contraire, les meilleurs outils pour me construire.




Références
Littérature de jeunesse

- Un livre pour la jeunesse qui vous a marqué petit ?

Deux à égalité et durablement : mes manuels de lecture de l’école primaire laïque et mon livre de catéchisme.

- Quels sont vos auteurs-illustrateurs de référence ou qui pour vous développent une approche intéressante ?

Depuis la faillite des éditions Messidor qui a été un tournant (avec le recul, je peux le dire), je me suis petit à petit éloigné du microcosme de la littérature pour la jeunesse où j’avais été très actif. Je ne sais plus très bien ce qui s’y passe et je n’ai plus les références qui me permettraient de répondre à cette question.

- Quels sont vos livres "coups de cœur", les "incontournables" en littérature de jeunesse ?

Pour les "coups de cœur", LES ÉVEILLEURS (Hachette hors collection) de Pauline Alphen et CE QUE J’ÉTAIS (Hachette Black moon) de Meg Rosoff. Pour les "incontournables", il n’y a que le temps pour faire le tri entre l’incontournable et le soluble. Mieux vaut le laisser répondre.

Culture

- Un film, une photo/illustration qui vous touche ?

Le seul, l’unique : TOUS LES MATINS DU MONDE.

- Un musicien

Les oiseaux de mon jardin et ceux des bois où je me promène avec ma chienne.

- Un lieu où vous aimeriez vivre

Je suis un sédentaire. Le lieu où j’aimerais vivre est précisément le lieu où je vis.

- Une phrase (une devise) qui vous guide

Je n’en ai pas. Même si l’avènement de la démocratie a largement redistribué les us et coutumes de la noblesse (sans parler de ses privilèges que nos nouveaux maîtres, ceux de gauche, héritiers revendiqués des abolitionnistes du 4 août, comme ceux de droite, se sont accaparé avec avidité), je continue de trouver à une devise un parfum aristocratique et je reste indéfectiblement le fils d’un ouvrier scieur et d’une femme de ménage. Je crois qu’une devise ne fera jamais partie de ma panoplie de vivant. Néanmoins, je tombe parfois sur des phrases qui me laissent sans voix. Elles m’accompagnent un instant, pendant lequel je suis avec elles dans un état de vibration identique, puis je les assimile, au sens alimentaire du terme, donc après les avoir « mangées » et je les oublie. Je vous cite celle-ci, lue récemment : « Il faut mourir de la déchéance de l’être et revenir à l’aube. » Son auteur s’appelle Nathalie Nabert.

Actualité
- Vos dernières (bonnes) lectures ?

LA DAME DE L’ARGONAUTE, (Denoël) de mon vieux copain Claude Duneton. Le destin d’une femme éblouissante, venue de sa Corrèze à Paris pour être bonne à tout faire et qui, de fil en aiguille (elle avait fait de la broderie pour gagner sa vie), a inventé l’océanographie au XIXè siècle.


MAO GRENADINE ET DENTELLES NOIRES, (Le grand miroir éditeur) un roman de Pierre Merle, jubilatoire et pourfendeur de l'autosatisfaction sorbonnardo-soixante-huitarde.


LES FILS D’ARIANE, (Arcadia éditions) un récit autobiographique du virtuose Paul Desalmand.


Ces trois-là sont co-fondateurs avec moi (et quelques autres écrivains, poètes, peintres, et chanteurs) de la librairie LA LUCARNE DES ÉCRIVAINS, sise au 115 rue de l’Ourcq, à Paris 19è.


LE MAÎTRE INTÉRIEUR, (Ad solem) de Nathalie Nabert.

- Un site (sur les techniques graphiques, un auteur-illustrateur, une approche particulière du texte, de la littérature...) que vous souhaitez recommander ?

Ce blog, d’une jeune femme qui n’est pas auteur, mais qui aime écrire. De courts textes élégants et délicats qu’elle tire des jours qui passent. Son regard paisible y décèle des instants rares. Joyaux bruts, invisibles de qui ne sait prendre le temps de respirer la vie, elle les tire du silence, les encourage à se révéler comme une dompteuse ferait avec des animaux timides, et les pousse jusqu’à nous. Ils nous apparaissent alors, tirés de leur gangue d’oubli, comme détourés par un halo de silence, simples de sincérité, transparents. Longtemps après les avoir écoutés, leur voix paisible nous rassure encore et l’on songe à celle qui écrit. On se prend à espérer être particule de sa lumière du jour. Attirant son regard, elle saurait nous redonner la livrée de cristal que nous avons perdue et nous ferait renaître.

Interprète de musiques ineffables, voici l’adresse de son blog : http://souslesable.blogspot.com/

Visitez-le, prenez-le temps d’y flâner. Vous verrez que je ne vous raconte pas d’histoires.

http://www.jacquescassabois.com

Auteurs et illustrateurs en lien avec l'interview

Illustration d'auteur

Jacques Cassabois

française