Les perdrix : un conte du Moyen-Age

Bruno Heitz s’empare d’un conte traditionnel du Moyen Age. Une femme berne mari et chapelain par gourmandise, hors de raison. Gombaut, un vilain, revient chez lui avec deux perdrix. Il laisse à sa femme le soin de les rôtir pendant qu’il va inviter le chapelain pour le repas. La cuisson accomplie dans les règles de l’art, le mari et le convive tardent. La tentation est trop grande, morceau par morceau, la dame se laisse aller à manger les perdrix. Tout le comique tient à la façon dont elle va se sortir de situation en inventant un mensonge qui la mettra à l’abri de la fureur de son mari.

A ce conte immoral mais très drôle, l’illustrateur apporte la robustesse de son dessin : gravé, cerné de noir, il saisit l'essentiel pour installer le Moyen Age : quelques voûtes, un coffre en bois, une table rustique, une broche, peu de couleurs entre bleu et rouge avec toutes les nuances des gris bleu et rouge violet un peu surprenants … et le décor est campé. On pense à Tomi Ungerer. Les recettes fondamentales du comique sont là tout entières. Faible, la femme doit user de stratagème pour ne pas subir la loi du plus fort. Les autorités du mari, du prêtre sont moquées. Le récit construit le suspense et les étapes nous font adopter le point du vue de la femme et craindre pour elle. Toute la théâtralité du conte est conservée : les ruses de la femme, les entrées et sorties des personnages vus en mouvement, femme hésitante dans sa cuisine ; paysan de retour ; prêtre qui s’enfuit. Les rôles sociaux sont respectés. Avec un plaisir gourmand, dans la veine du roman de Renart, Bruno Heitz offre aux lecteurs, une plaisante entrée dans les fabliaux du Moyen Age.