Petits sauvages

Elaine a perdu son père et ne parvient pas à oublier cet homme fantaisiste et drôle. Elle s’invente un ami imaginaire, Petit Sauvage, dit Skoosh et passe ses journées avec lui dans le jardin ouvrier de la famille. Mais la mère d’Elaine, ainsi que le voisin Monsieur MacNamara, ne voient pas d’un bon œil les absences à l’école de la petite fille : elle ne sait toujours pas lire et écrire.
David Almond reprend joliment des thèmes classiques de la littérature de jeunesse – le deuil d’un parent, l’ami imaginaire -, avec toutefois quelques touches de l’originalité puissante et assumée qu’on lui connaît : les fées poussent en terre, le jardin ouvrier devient jungle, Elaine danse avec sa mère sur le son de maracas, Petit Sauvage a le physique d’un monstre… L’ami imaginaire d’Elaine n’est en effet pas seulement consolateur, il exprime aussi toute la violence et la contradiction des sentiments de celle qui l’a créé. Et la mère, drapée dans l’oubli de son mari décédé, commence à voir la petite créature seulement quand elle laisse libre cours à ses émotions. MacNamara, un chœur de voix (tour à tour les professeurs, le voisinage, d’autres enfants…) symbolisent l’enfermement dans une « normalité » aux contours bien arbitraires. Quatorze scènes voient la situation évoluer peu à peu, jusqu’à la dégustation par Elaine et sa mère des framboises qu’avaient plantées le père. Le deuil commence et la petite fille peut alors porter pleinement son nom de famille : Grew (« grandit » en anglais). Je n’ai pas aimé les illustrations un peu dures et comme déformées, mais je reconnais qu’elles rajoutent un caractère singulier au texte de la pièce.