Le Petit Chaperon rouge

Thierry Dedieu est l’un de nos illustrateurs majeurs, dont chaque livre suscite un intérêt sans cesse renouvelé. Car il n’est jamais là où on l’attend, prenant plaisir à explorer des univers et des styles graphiques différents.
Il s’empare ici d’un conte très connu et prend pour référence graphique le motif de la toile de Jouy.
Cette fameuse toile, créée au 18ème siècle dans la manufacture d’Oberkampf sur la commune de Jouy-en-Josas, a joué et joue toujours un rôle majeur dans les arts décoratifs. Cette toile de coton, appelée aussi indienne, que l’on tend sur les murs, est une sorte de grand livre d’images : les dessins, le plus souvent monochromes, représentent des personnages évoluant dans des décors et des paysages.
Thierry Dedieu compose donc ici au trait noir une série de saynètes, dont les motifs se répètent d’image en image. Chaque personnage a sa couleur : la petite fille est en rouge, la mère entièrement parme, la grand-mère en bleu violet et le loup brun très foncé. Ils évoluent dans des décors presque figés, une chaumière, un arbre, un moulin ou un clocher au loin, qui forment un univers champêtre. Certains éléments, cependant, bougent et font avancer l’histoire. L’on y voit un cochon et une poule qui se poursuivent, un bûcheron qui travaille, un lièvre qui se carapate. Et puis le Petit Chaperon Rouge qui chemine et rencontre le loup. Les scènes majeures du livre, où le bleu violet de la grand-mère et de son grand lit à baldaquin éclate dans la page, ne sont que suggérées. Le bras de la grand-mère, dissimulée par les rideaux du lit, se tend lorsque le loup la dévore tandis que les chouettes silencieuses et effrayées ouvrent grand leurs yeux quand la petite fille se fait manger à son tour. Le conte d’ailleurs s’arrête là.
Une variation très intéressante qui prouve, une fois de plus, l’étendue du talent de Dedieu.