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10 suggestions de lecture pour les amoureux des livres

Le 23 avril, c’est la Journée mondiale du livre et du droit d'auteur. A cette occasion, nous vous avons préparé une petite sélection d’ouvrages qui mettent à l’honneur non seulement le livre et la lecture, mais également les librairies et les bibliothèques, ces lieux chaleureux qui nous tiennent particulièrement à cœur et que nous nous réjouissons de pouvoir retrouver à la fin du confinement. Et nous en profitons également pour dire un grand merci à tous les auteurs et illustrateurs qui nous font rêver! Bonnes lectures, et prenez soin de vous!

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Ricochet
23 avril 2020

1. Mais c’est un livre sans images!, de Sergio Ruzzier, Seuil Jeunesse, 2016
Album, dès 3 ans

Tout content, un caneton trouve un livre par terre. Mais le contenu de ce bel ouvrage à la couverture rouge contrarie fortement l'animal. «Où sont les images?», se demande-t-il. Une fois sa colère exprimée, il prend l'objet entre ses pattes pour l'examiner. Au même moment surgit un drôle d'insecte curieux qui l'incite à déchiffrer les mots. Pris au jeu de la lecture, nos deux acolytes franchissent un pont reliant deux mondes. Dans ce nouvel univers, les paysages changent de couleurs et de formes, d'étrangers ils deviennent familiers, drôles, tristes ou propices à la zénitude... Une fois rentré chez lui, notre héros se remémore, sourire au bec, sa première expérience au pays des mots qui fabriquent des images.

A travers cet album largement illustré, Sergio Ruzzier parle du délicat passage de l'image à l'écrit. Si au départ cette plongée vers l'inconnu fait peur, le plaisir de reconnaître les mots et de créer son propre langage imagé finit par l'emporter. «Tous ces mots t'emportent très très loin… et puis… ils te raccompagnent à la maison… et là, ils restent avec toi… pour toujours.». Un récit métaphorique réussi pour convaincre les plus réticents à s'ouvrir au monde de l'écrit. (EP)

Livre sans images
Couverture et image intérieure de «Mais c'est un livre sans images!», de Sergio Ruzzier (©Seuil Jeunesse)

2. Le petit poisson rouge, de Taeeun Yoo, Kaléidoscope, 2018
Album, dès 3 ans

JeJe accompagne son grand-père bibliothécaire dans la forêt. Curieusement, ils y vont à vélo, un poisson rouge dans son bocal accroché sur le porte-bagages. Dès cette page, on est saisi par une atmosphère étrange. Dans une page bistre, où se dessine finement une grande maison au bout d’un chemin, en pleine forêt, le curieux équipage composé par le vieil homme et son petit-fils n’est éclairé que par la petite tache rouge du poisson arrimé par des ficelles. Un sentiment d’étrangeté nimbe le récit de rêve et de poésie. Tout d’abord JeJe découvre la bibliothèque, immense, sorte de caverne où il s’endort. Alors se déploie le rêve. À la suite du poisson qui s’enfuit, l’enfant s’accroche aux oiseaux qui passent, ils survolent l’océan avant de retrouver le réel, la dureté du sol où il s’est endormi.

Dans la lignée de Little Nemo ou du Merveilleux voyage de Nils Holgersson, cet album «raconte» une chanson douce, celle de la complicité entre un grand-père et son petit-fils, du pouvoir des livres, de la magie du rêve qui naît de la lecture, de l’amitié entre l’enfant et le poisson. Un premier album prometteur de Taeeun Yoo. (DB)

Petit poisson rouge
Couverture et image intérieure de «Le petit poisson rouge», de Taeeun Yoo (©Kaléidoscope)

3. Le livre que personne ne lisait, de Carolina Rabei, Circonflexe, 2019
Album, dès 4 ans

Seuls quelques titres de Carolina Rabei sont aujourd'hui disponibles en français, mais le travail de cette jeune plasticienne mériterait d’être mieux reconnu et diffusé dans cette langue. L’artiste britannique fait preuve d’une grande maestria pour faire naître l’empathie du lecteur envers les univers très variés qu’elle propose. Le livre que personne ne lisait en est un exemple parfait.

Dans la section enfantine d'une bibliothèque municipale, la nuit, les livres s’animent et échangent leurs expériences, ravis de toutes leurs rencontres avec les jeunes lecteurs. Seul un album sur le faîte d’un rayonnage, où une main bien intentionnée l’a placé pour le mettre en valeur, se sent bien isolé et déprimé. Grâce à la solidarité de ses compagnons, il va pourtant rencontrer un jeune garçon, attiré par ses images de dinosaures. Le livre figurera bientôt au top des albums les plus empruntés…

Alerte et émouvante, cette charmante histoire sur les plaisirs insoupçonnés de la lecture, les joies du partage et les trésors à découvrir dans les bibliothèques, est très plaisante à lire en elle-même, mais est également assortie d’une illustration remarquable. En effet, nul besoin de savoir lire justement pour comprendre ce qu'il se passe: les dessins parlent d’eux-mêmes, dans un style naïf et animé, où les couleurs chaleureuses disent la gaieté et le bonheur de ces instants partagés. De quoi avoir très envie de s’inscrire à la bibliothèque!

L’auteure connaît son public, se rappelle peut-être sa propre enfance, et nous offre un petit moment de bonheur sans pareil. Ne pas bouder son plaisir surtout, en attendant de découvrir d’autres merveilles signées Carolina Rabei traduites en français! (VC)

Le livre que personne ne lisait
Couverture et image intérieure de «Le livre que personne ne lisait», de Carolina Rabei (©Circonflexe)

4. La montagne de livres, de Rocio Bonilla, Père Fouettard, 2017
Album, dès 5 ans

Depuis qu’il est né, Lucas a une irrépressible envie de voler. À chaque Noël, à chaque anniversaire, le même vœu est souhaité… mais jamais exaucé. Sa mère lui annonce pourtant, tout en lui offrant un livre: «Il y a d’autres façons de s’envoler, Lucas». Pour le petit garçon, c’est la découverte: on peut voyager et laisser s’envoler l’esprit grâce à la lecture. Et Lucas lit tellement que ses livres forment alors une gigantesque montagne.

La symbolique est connue et elle est ici habilement narrée pour créer un effet d’attente et de surprise chez le jeune lecteur qui comprendra bien le cheminement progressif des pensées du personnage principal. Avec poésie, l’auteure a en effet trouvé les mots justes pour faire passer son message tout en délicatesse. Aussi, les illustrations, pleines de douceur, contribuent à générer un climat d’apaisement bienveillant. La montagne de livres est ainsi un agréable album qui donne envie de se blottir dans un coin pour lire encore et encore, sans jamais s’arrêter. (DM)

5. Loup, lis-tu?: pourquoi les enfants ont raison d'apprendre à lire (et d'aller à la bibliothèque), de Thierry Lenain, Isabelle Wlodarczyk et Thanh Portal, Oskar Jeunesse, 2016
Roman, dès 6 ans

C’est l’histoire d’un loup qui s’est déguisé en mouton pour pouvoir aborder sa prochaine victime. Mais voilà, ladite victime, en l’occurrence une petite fille bien éveillée, se révèle plus tenace qu’il ne le pensait et le loup doit déployer des ruses à la pointe ultramodernes pour espérer parvenir à ses fins. Un sms d’appel au secours envoyé à la mère-grand de la petite fille et le tour est joué! En tous les cas, c’est ce que croit le loup…

Cette version moderne du conte traditionnel du Petit Chaperon rouge publiée dans la collection Trimestre des éditions Oskar propose aux lecteurs débutants de faire connaissance avec un loup facétieux apprenti-détective, une jeune fille très intelligente amatrice de livres et une grand-mère très dynamique! Aux côtés de ces divers personnages, ces mêmes lecteurs se délecteront de l’histoire parodiée et des illustrations foisonnantes de clins d’œil qui rendent hommage à la lecture, et tout particulièrement à ses bienfaits. N’est-ce pas en effet la lecture qui a rendu la petite fille maligne et lui a permis de déjouer les plans du loup?

Afin d’encourager les enfants à la lecture autonome de ce livre, les éditions Oskar ont par ailleurs choisi d’utiliser une police de caractère spécifique et un format adaptés aux yeux et aux mains des plus jeunes. Un livre intelligent donc, tant sur la forme que sur le fond. (HD)

6. Le chien de la bibliothèque, de Lisa Papp, Circonflexe, 2017
Album, dès 6 ans

Madeline est désespérée: à l'école, elle ne parvient pas à lire correctement son manuel, malgré une préparation intensive à la maison. Sous pression, la fillette bafouille, ânonne. Elle n'est donc pas prête d'obtenir une belle étoile, la récompense des meilleurs lecteurs! Sa maman décide alors de l'emmener à la bibliothèque. Elle y rencontre d'autres enfants, et surtout Bonnie. Bonnie est douce, poilue, rassurante… Madeline parvient à raconter son texte à la belle chienne blanche et reprend doucement confiance en elle.

La pratique anglo-saxonne de l'accompagnement de la lecture par un animal n'a pas vraiment atteint la France, et c'est bien dommage. La présence neutre et même sécurisante du chien encourage l'enfant à faire ses expériences et, in fine, à apprendre sans s'en rendre compte. Lisa Papp utilise un trait doux proche de celui d'Helen Oxenbury qui donne encore plus envie: Bonnie et ses chiots crèvent la page autant que le cœur de la petite Madeline! A découvrir. (SP)

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Couvertures de «La montagne de livres», «Loup, lis-tu?: pourquoi les enfants ont raison d'apprendre à lire (et d'aller à la bibliothèque)» et «Le chien de la bibliothèque» (©Père Fouettard/Oskar Jeunesse/Circonflexe) 

7. La librairie de tous les possibles, de Shinsuke Yoshitake, Milan, 2018
Bande dessinée, dès 10 ans

Avec son tablier jaune, son crâne dégarni et sa petite moustache, le propriétaire de la librairie de tous les possibles soigne son look comme sa clientèle. Soucieux de répondre aux demandes les plus folles de ses lecteurs, ses étagères regorgent d'ouvrages rares, de livres en fête ou d'accessoires de lecture. De l'album sauteur qui glisse dans le sac sans demander la permission à celui qui se lit à deux ou seulement au clair de lune, le libraire des lieux en connaît un rayon sur la question. Philosophe à ses heures, il tire un parallèle intéressant entre l'être humain et le livre: «Nous sommes comme des livres. Chacun d'entre nous est sa propre histoire. Les autres ne la connaissent pas. Nous attendons que quelqu'un nous trouve. Nous espérons que quelqu'un lira en nous. Certains ont du succès, d'autres non. Mais chaque rencontre change un peu notre vie. Chaque rencontre est une fête.»

Un petit ouvrage espiègle et poétique, salué par Amélie Nothomb, qui met à l'honneur le livre sous toutes ses formes, sans oublier tous les acteurs – libraires, bibliothécaires, éditeurs… – qui le promeuvent! (EP)

8. Je m’appelle livre et je vais vous raconter mon histoire, de John Agard et Neil Packer, Nathan, 2015
Roman, dès 11 ans

Les documentaires jeunesse sur l'histoire et la fabrication du livre ne manquent pas dans l'édition, toujours prompte à éduquer les petits lecteurs. Je m'appelle livre... fait un peu varier les choses: c'est un vrai roman au long duquel un «je» – un livre parmi d'autres – raconte ses origines, ses évolutions, son avenir potentiel. Avec passion, drames (autodafés) et joies (l'invention de l'imprimerie) s'entremêlent. Nul doute que l'adulte y trouvera également son content d'informations pertinentes, aussi bien générales qu'anecdotiques. Les citations finement choisies ne gâchent rien: «Si quelqu'un dérobe ce livre, qu'il périsse de mort violente. Qu'il soit rôti dans la poêle. Que la fièvre et le haut mal le rongent. Qu'il soit roué et pendu. Amen.» (inscription sur une Bible du XIIe siècle). Les illustrations noir et blanc savent se faire inventives et respectueuses, bref équilibrées pour accompagner la formidable aventure du livre.

Le bouquin (du vieil anglais boc, bois de hêtre) ne se veut pas panégyrique du papier contre l'écran, et insiste sur la notion d'évolution. Et puis, laissant de côté l'auteur, l'éditeur, le libraire, il consacre quelques belles pages au métier de bibliothécaire, finalement assez souvent oublié. Pour toutes ces raisons qui le distinguent, pour son enthousiasme et sa confiance chevillés à la reliure, Je m'appelle livre... mérite bien un petit détour. (SP)

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Couvertures de «La librairie de tous les possibles», de Shinsuke Yoshitake» et «Je m’appelle livre et je vais vous raconter mon histoire», de John Agard et Neil Packer (©Milan/Nathan) 

9. L’arrache-mots, de Judith Bouilloc, Hachette Jeunesse, 2019
Roman, dès 13 ans

Vous avez lu et aimé La passe-miroir de Christelle Dabos? Alors vous lirez et aimerez L’arrache-mots de Judith Bouilloc. Mais là où se créait sur plusieurs tomes un monde touffu où le propos s’allongeait, introduisait toute une philosophie, pour ne pas dire une cosmogonie, Judith Bouilloc reste dans le domaine de l’imaginaire, du plaisir de la fiction, et ce malgré une intention politique habilement menée.

Suivie par un narrateur externe très attentif, Iliade vit dans les livres. Elle a le don d’en «arracher les mots», c’est-à-dire de leur donner vie sous forme d’illusions. Elle peut même les détruire, ce qui se montrera utile dans l’intrigue… Déçue par un premier amour d’écrivain qui l’exploitait à son profit, elle accepte un mariage avec un membre de la famille royale qu’elle ne connaît même pas.

Déplacée à la cour, elle devient conteuse de la reine et découvre les faux-semblants d’un monde cruel. Elle rencontre aussi son fiancé, Adil Tarlyn, un juge aussi rigide que les lois qu’il défend. Iliade est désespérée et voudrait revenir dans sa petite bibliothèque de province. Puis la situation évolue peu à peu et la jeune femme prend conscience de son pouvoir… et de son amour. Délicieux et tourbillonnant, drôle et plein de rebondissements, un roman d’une inventivité réjouissante. (SP)

10. Le bleu de tes mots, de Cath Crowley, Pocket Jeunesse, 2019
Roman, dès 13 ans

Passionnée des fonds marins, Rachel adore échanger avec Henry, fils de libraire et épris de poésie. Depuis dix ans, ils sont meilleurs amis. Mais les années passant, Rachel a développé d’autres sentiments pour Henry qui, lui, est obnubilé par Amy avec laquelle il vit une relation amoureuse entrecoupée de ruptures et de réconciliations. Lorsque la famille de Rachel décide de quitter Gracetown pour emménager à Sea Ridge, Rachel décide de partager enfin ses sentiments avec Henry, déposant une lettre dans le livre préféré de son ami.

Demeurant sans réponse d’Henry, Rachel tente de l’oublier et investit sa nouvelle vie… Jusqu'au décès brutal de son frère, Cal, tragiquement noyé. Rachel et sa mère se renferment dans une douleur infinie et solitaire. Excellente élève, Rachel finit par délaisser ses études et rate sa dernière année de lycée. Sa tante Rose lui propose alors de revenir à Gracetown et lui trouve un emploi auprès de la librairie de son ancien ami. Rachel se voit obligée de travailler aux côtés d’Henry et de reprendre le fil de leur relation.

Narrée alternativement par Rachel et Henry, l’histoire de ces deux amis qui se retrouvent après une absence de trois ans s’entrecoupe de leurs correspondances, mais également de celles d’autres couples gravitant autour de la librairie des parents d’Henry. En effet, l’auteure a tissé l’intrigue autour de la Bibliothèque épistolaire, un rayon insolite de livres au sein de la librairie. Les différents ouvrages qui s'y trouvent ne sont pas à vendre, mais peuvent être consultés et surtout annotés sur place. Les clients sont encouragés à souligner des phases qui les touchent et même à y laisser des lettres à l’intention d’autres lecteurs, faisant ainsi de la Bibliothèque un réceptacle d’espoirs, de secrets et de sentiments mis à nus.

C’est une très belle surprise que la découverte de ce roman pour ados. Entre pudeur et réalisme, l’écriture de l’auteure australienne Cath Crowley nous emporte dès les premières lignes par la sensibilité qui s’en dégage. Le bleu de tes yeux traite de grands thèmes comme l’amour, le deuil, les questionnements existentiels et les rêves que l’on formule pour sa vie d’adulte, mais y niche une place d’honneur au pouvoir des mots.

«Les livres sont spéciaux, Rachel. Les livres sont importants. Les mots sont importants. Les mots comptent, en fait. Ils ne sont pas vains, comme tu l’as suggéré. Sinon, ils ne pourraient pas amorcer des révolutions, ils ne changeraient pas l’histoire. Si ce n’était «que des mots», on n’écrirait pas de chansons et on n’en écouterait pas. Les enfants ne supplieraient pas pour qu’on leur lise des histoires. (…) On ne tomberait pas amoureux grâce à eux, on ne se sentirait pas mal à cause d’eux, on ne souffrirait pas pour eux, et on n’arrêterait pas de souffrir grâce à eux.» (NT)

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Couvertures de «L’arrache-mots», de Judith Bouilloc et «Le bleu de tes mots», de Cath Crowley (©Hachette Jeunesse/Pocket Jeunesse) 

Les rédactrices: Danielle Bertrand (DB), Véronique Cavallasca (VC), Hélène Dargagnon (HD), Déborah Mirabel (DM), Emmanuelle Pelot (EP), Sophie Pilaire (SP), Nicole Tharin (NT)


Image de vignette: illustration de Carolina Rabei (©Carolina Rabei)